Les socialismes africains ou la reconquête de l’homme

On ne peut aborder le thème des socialismes africains sans soulever la question de la race. Yves Bénot remarquait que, plus encore qu’au Maghreb, en Afrique subsaharienne « tout a été brisé, les anciens États broyés, les ethnies morcelées, la personnalité nationale voir simplement humaine des Africains noirs niée, attaquée de toutes les manières. »[1] Cette remarque invite à prendre la mesure de la « récusation originaire de l’humain dans l’Africain […] cette tentative de confinement dans la différence brute, ce ravalement primitif du signe africain » que « Senghor, Césaire, Fanon et les autres se sont efforcés de contredire, parfois vaille que vaille, en fonction des moyens de leur temps »[2], pour citer Achille Mbembe. C’est pourquoi il n’est possible de comprendre complètement les enjeux de la pensée politique africaine née des impératifs anticoloniaux qu’à condition qu’on la prenne comme ce que de nombreux auteurs, vraisemblablement après Fanon, ont appelé un « nouvel humanisme » – c’est-à-dire une tentative de reconquête d’une humanité niée par les doctrines et les pratiques du racisme colonial.

On peut dire qu’il s’agit là du souci constant des théoriciens des « socialismes africains ». Ces derniers sont aussi des politiques, et les auteurs d’un faisceau de doctrines disparates qui peuvent s’apparenter surtout à une certaine « orientation idéologique »[3]. Cependant, la centralité d’une question philosophique comme celle de l’humanisme ne s’explique que pour moitié par la réalité de la violence et des humiliations subies par les Noirs depuis plusieurs siècles. Il faut également considérer le rôle capital des intellectuels dans les luttes indépendantistes africaines, du fait des spécificités de la stratification sociale du continent. En effet, que la revalorisation, pour ne pas dire la réinvention, de l’humanité des Nègres soit apparue comme un enjeu capital est une chose. Que cette entreprise intellectuelle ait souvent été le fait d’individus qui, par ailleurs, prirent une part très active à la lutte contre la colonisation des territoires africains en est une autre, et cette singulière coïncidence ne s’explique que par certaines spécificités d’ordre sociologique. Ainsi que l’affirme Yves Bénot,

 

il n’y avait pas le choix ; faiblesse ou inexistence du prolétariat proprement dit, prédominance d’une masse paysanne durement exploitée, maintenue dans le cadre de structures anciennes à l’intérieur d’un régime tout différent, difficultés de communication avec le monde et entre soi, barrages multipliés interdisant l’accès à la culture ; pour toutes ces raisons, les intellectuels africains se trouvaient nécessairement les seuls à pouvoir jouer le rôle dirigeant dans cette lutte.[4]

 

Mais il ne s’agit pas de s’en tenir à cette constatation. Il faut aussi contredire les observateurs qui, y compris dans le camp anticolonial, affirment comme Jean Ziegler que ces leaders africains « n’ont pas été les créateurs de nouveaux systèmes de pensée mais furent des dirigeants, des inspirateurs, des organisateurs de mouvements sociaux. »[5] Bien sûr, tout cela, ils le furent. Mais pas seulement. Non seulement ils produisirent des systèmes de pensée nouveaux, mais ils n’eurent pas d’autre choix, la situation dans laquelle ils les élaborèrent étant incomparable à toutes celles qui, jusque là, avaient été envisagées par des corpus révolutionnaires dont il était dès lors inconcevable de répéter la lettre.

En outre, la pensée politique indépendantiste africaine est d’emblée « hybride », tributaire de doctrines auparavant élaborées au sein de la diaspora noire, et dont l’héritage infléchira à la fois l’appropriation du marxisme et l’imagination politique au sein des nations africaines en devenir. L’américain W.E.B. Du Bois, qui est selon Léopold Sédar Senghor le « fondateur historique de la Négritude »[6], identifiait, au début du XXe siècle, trois étapes de l’action, indispensables à l’émancipation du peuple noir. La première a consisté en une lutte pour l’abolition de l’esclavage des Nègres, c’est-à-dire contre le travail forcé et le marché mondial des êtres humains. La seconde est la lutte pour la citoyenneté, pour la reconnaissance des droits civiques. La dernière, enfin, est celle qui lie le plus intimement les préoccupations des populations ségrégées d’Amérique du Nord et celles de leurs homologues africains colonisés. Comme l’écrit Paul Gilroy, ce troisième « courant de luttes politiques se définit par la recherche d’un espace indépendant où la communauté noire autonome pourra se développer à son rythme et selon son orientation propre »[7]. Les échos de ces luttes et de ces théories purent se déployer à l’occasion de plusieurs grands congrès rassemblant militants africains ou diasporiques, et dont le plus célèbre, anglophone, fut sans doute le Ve congrès panafricain, à Manchester, où se rencontrèrent le leader ghanéen Kwame Nkrumah, le penseur politique caribéen George Padmore, et bien sûr W.E.B. Du Bois lui-même. Ces interactions invitent à considérer l’importance de la diaspora africaine pour la constitution d’une pensée politique socialiste en Afrique. Comme le note Yves Bénot, c’est paradoxalement l’ignorance partagée des situations des différents continents, et des différents modes d’oppression qui s’y jouent, qui permirent à Du Bois et aux panafricanistes de « percevoir immédiatement l’aspect universel de leur entreprise, de proclamer l’unité de leur lutte et de celle de tous les peuples noirs, tous en butte à la domination raciste. »[8] On voit bien là les signes de cet espace culturel que Paul Gilroy a appelé « l’Atlantique noir », tant en ce qui concerne des échanges théoriques très nombreux, qu’en matière de collaboration politique.

La situation coloniale a toujours impliqué une ambivalence des représentations de la tradition africaine. Les socialismes africains ne coïncident pas toujours avec une quête d’authenticité et il ne s’agit pas de promouvoir une tradition culturelle précoloniale pure de toute emprise : on sait que nombreuses furent les instrumentalisations par le colonialisme de structures sociales existantes, à des fins de sécurité ou à des fins économiques[9]. Ce que certains de ces penseurs ont  cherché à préserver, c’est plutôt un ensemble de stratégies de résistance à la terreur raciale et à une considérable violence subie. Ce contexte colonial d’état d’exception permanent a pu créer ses idéologies indigènes, et faire ressurgir des croyances dont Frantz Fanon n’a pas manqué de condamner durement le caractère superstitieux[10]. Pourtant, en Afrique comme dans la diaspora, les récits, la musique et le chant purent figurer des vecteurs de mobilisation privilégiés[11], souvent, non sans rapport avec une certaine ferveur religieuse. Comme l’exprime bien Paul Gilroy, ces « formes culturelles noires abritent et même cultivent un rapport dynamique avec la présence de la mort et de la souffrance »[12], créant par là des philosophies et des modes d’expression distincts de ceux dont on hérite des Lumières, mais dont le rôle est bien d’organiser la conscience, la mémoire sociale, l’histoire commune. Ainsi, ce qui peut sembler, aux yeux des Noirs, menaçant dans le marxisme comme il est majoritairement compris tout au long du premier XXe siècle, ce n’est pas le renoncement à un folklore mystifiant.  Mais la perte de sa propre tradition politique, faite de résistances aux monolithiques violences de la traite, de l’esclavage, de la colonisation. Y renoncer, ce pourrait être également renoncer aux langages poétiques (Césaire, Senghor, etc.), autobiographiques (Nkrumah, Du Bois, etc.), hybrides (Fanon, Wright, etc.), par lesquels ces expériences d’exploitation et de lutte communiquent et se nourrissent mutuellement au sein de l’Atlantique noir. L’enjeu des socialismes africains, c’est donc alors d’élaborer une pensée politique qui ne soit pas l’abandon de cette histoire, mais qui lui permette au contraire de se diriger, par-delà la scène originaire de la mort et de la violence raciale, vers l’avènement d’une nouvelle humanité.

Comme il serait hasardeux de tenter de dégager un ensemble d’invariants communs à l’ensemble des doctrines susceptibles de se rapprocher de ce qu’on appelle « socialismes africains », on se contentera d’étudier succinctement deux œuvres considérables. Celle du premier président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor tout d’abord, et celle du premier chef d’État du Ghana, Kwame Nkrumah. On insistera sur leurs grandes différences, mais avouons d’emblée qu’ils ont été choisis pour ce qu’ils ont en partage. Ces hommes d’État étaient deux intellectuels, au sens le plus fort du terme : ils ont beaucoup écrit, tant sur l’Afrique et sur leurs propres pratiques que sur des questions plus abstraites. De chacun, on peut dire qu’il a élaboré une option socialiste originale et profonde.

 

1. Senghor : de la Négritude à la social-démocratie

La pensée de Léopold Sédar Senghor, et la généalogie des attaques qui furent dirigées contre elle, nous invitent à un examen critique du syntagme « socialisme africain » comme il a été le plus souvent entendu en francophonie. Mais, selon l’auteur lui-même, cet aspect n’est pas le plus fondamental de sa pensée. Il est en effet secondaire par rapport à la philosophie humaniste élaborée par Senghor, la fameuse proposition de la Négritude, qui résume sa stratégie de reconquête de l’humanité africaine. « La Négritude, c’est une certaine manière d’être homme, surtout de vivre en homme. C’est la sensibilité et, partant, l’âme plus que la pensée »[13], écrit Senghor. Ainsi, l’une des caractéristiques marquantes de son œuvre et de sa pratique consiste en une profonde valorisation des arts, couplée à la conception d’une anthropologie du Nègre créateur. C’est avec ces atouts qu’il entend faire asseoir l’Africain à la table de la « Civilisation de l’Universel » qu’il n’a de cesse d’appeler de ses vœux. La personnalité africaine aurait en effet ses propriétés, héritées de l’histoire. Et, au rang de ces spécificités, une certaine tradition de la vie communautaire se tient en bonne place. Le caractère historique des spécificités raciales pointé par Senghor n’est pas sans importance, puisqu’il tâche d’historiciser la constitution des races, de mettre en évidence un métissage originaire, et donc de substituer la dynamique à la substance ; c’est là le racisme par antiracisme dont parle Sartre à son propos. Or, de nombreux critiques l’accuseront de faire très exactement l’inverse.

Pour comprendre les enjeux de cette « idéologie »[14], il faut avoir en vue ses origines parisiennes. En effet, « la Négritude est bien une spécificité française »[15], dont l’histoire est inséparable de celle de la doctrine française de l’assimilation[16]. On ne répétera jamais assez que la Négritude de Senghor et celle de son ami Césaire sont, plus que différentes, incompatibles. Mais elles sont le fruit de la même conjoncture, et partagent une même expérience originaire, spécifique à leurs consciences d’intellectuels noirs immergés dans le système éducatif français du premier XXe siècle. Tous deux le confessent : « c’est contre ce but de l’Assimilation, avec le programme et la méthode qui en découlent logiquement que je m’insurgeais – respectueusement, mais sans ambiguïté »[17] écrit Senghor ; « L’assimilation pour moi, c’était l’aliénation, la chose la plus grave »[18], écrit pour sa part Césaire. Si ces deux citations disent la même chose, les différences de style cristallisent d’une certaine façon les spécificités de deux pensées. Il n’est pas sûr que les critiques contemporaines qui accusent Senghor de racisme différentialiste se fourvoient quant au fond. Mais il est certain qu’elles s’en sont tenues à un niveau d’analyse superficiel qui n’a pas bien pris la mesure du contexte. Ce sont bien les héritages intellectuels de l’assimilationnisme qui, en France, autorisent que l’on taxe de racisme quiconque utilise le terme de « race », ou en légitime l’emploi dans une situation politique déterminée. Comme le souligne Souleymane Bachir Diagne, « il y a au principe du mouvement qui s’est baptisé ‘‘négritude’’ ce que Gayatri Chakravorty Spivak appellerait un ‘‘essentialisme stratégique’’, c’est-à-dire de réponse et de résistance. Mais ce langage est en permanence aussi miné par celui de l’hybridité et des identités fluides »[19]. Même l’un de ses adversaires, le philosophe béninois Stanislas Adotevi, le reconnaît malgré les dénégations de Senghor : « la négritude est politique avant d’être poétique […] c’était hier une des formes possibles de la lutte d’émancipation : le premier moment de l’exigence actuelle. »[20]

L’hégémonie du discours raciste, dont il faut prendre la mesure, implique que de nombreuses attaques furent menées par des penseurs Noirs à l’intérieur des limites du racisme lui-même. Ce qu’une lecture contemporaine vise comme une répétition de préjugés est parfois une subversion des épistémologies racistes plus profonde qu’il n’y paraît. Ainsi, en 1885, De L’Égalité des races humaines, de l’haïtien Antenor Firmin sous titré « anthropologie positive » fait-il le pari de lutter contre le racisme à l’intérieur même du discours de l’anthropologie physique. En fait, le caractère effectivement raciste du texte de Senghor tient moins aux signes qu’il inverse et aux subversions qu’il opère, qui participent d’une stratégie culturelle explicite, qu’à ce qui passe sous les radars et qu’il répète tel quel. Il reprend en effet à son compte le lien supposé entre « tempérament », race et personnalité qu’il trouve chez Léone Bourdel. Ses thèses, qui associent aux différents groupes sanguins des caractéristiques psychologiques, feraient rire le lecteur contemporain si elles n’étaient pas fruit d’une lente élaboration des sciences de la race. Elsa Dorlin s’est attachée à montrer que, dès les travaux des médecins et biologistes du siècle classique,

 

le tempérament a permis d’opérer ce processus de naturalisation des différences anthropologiques, au fondement de la définition moderne de la race. […] En ce sens, le tempérament peut être défini comme un schème, comme une notion-outil, il fournit la règle d’application des catégories politico-historiques que sont le sexe ou la race.[21]

 

Ces thèses, Senghor s’en empare et en fait un socle sur lequel il entend bâtir une pensée dont l’objectif explicite est la revalorisation de la personnalité noire. Mais, nécessairement, son discours ne peut que se trouver lourdement handicapé par de si contestables bases. La Négritude n’est pas explicitement une doctrine raciste ou racialiste. Elle représente plutôt une idéologie mal dégrossie qui, à force de vouloir tout embrasser de la science et de la culture modernes, pour y planter son drapeau noir, finit par mal étreindre. Et Senghor de se perdre dans une métaphysique floue, fondée sur des doctrines dont, du fait de son manque de vigilance, il peine à filtrer le substrat suprémaciste blanc. Car il faut bien reconnaître que si une anthropologie nègre a pu naître, sous la plume de Senghor, des textes sur la mentalité primitive de Lévy-Bruhl, des essais d’administrateurs coloniaux et de psychologues racistes, il ne s’agit certainement pas d’un suprémacisme noir – bien au contraire.

Reste que le champ privilégié d’une lutte définie comme lutte contre l’assimilationnisme est, par essence, celui de la culture et non celui de la politique. Ce problème n’en est pas un pour Senghor, qui s’en félicite au contraire : « Nous disions simplement que la culture était plus importante que la politique, et que la ‘‘Traite des Nègres’’ s’expliquait, d’abord, par le mépris culturel. Et que l’instrument le plus efficace de notre libération serait la Négritude, plus exactement, la Poïésis : la Création »[22]. En Afrique, le producteur marxien se fait créateur, poète. Pour Senghor, « le poète vit en communialité avec l’objet […]. Avec cet être qui, pour les savants et philosophes, est force vitale. Et le poète le ren-force, cet être, en le faisant plus-être par son art, par ses images analogiques, encore plus par sa mélodie et son rythme : par son chant qui danse »[23]. Ce vitalisme, l’auteur le prône mêmement en matière de politique, et il fait du « plus d’être », c’est-à-dire du renforcement des solidarités, en enjeu majeur[24].

Pour appréhender plus concrètement cette pensée politique senghorienne, on peut recourir aux analyses de Manga Kuoh, qui classe en deux catégories les reproches qui ont été adressés au poète-président du Sénégal. On s’est déjà expliqué quant à la première : ce sont les accusations de racisme. Quant à la seconde, il écrit que « le référentiel social-démocrate éclaire pleinement la pensée de Senghor. Aussi subit-il les attaques virulentes mais, somme toute, classiques du marxisme contre le social-démocrate. »[25] Cette appartenance, constamment revendiquée par Senghor, ne fait pas de doute. Mais il est possible que Manga Kuoh sous-estime l’interdépendance entre la pensée de la Négritude et le « socialisme africain » qui, selon le poète-président, en découle. Pour Stanislas Adotevi, le « nègre dans la civilisation de l’universel est un subalterne. Aussi l’approche éternitaire du nègre senghorien n’est-elle pas une simple démarche métaphysique mais une méthode de gouvernement. »[26] Et cette méthode est précisément le socialisme africain, sous son acception senghorienne. On peut étayer cette thèse de faits. Pour prévenir toute hégémonie de l’idée d’indépendance aux colonies, le président du conseil Guy Mollet avance au milieu des années cinquante l’idée « d’interdépendance des peuples ». L’humanisme universaliste de façade peine à cacher la volonté de poursuivre l’exploitation des masses indigènes. Cette idée sera pourtant vite reprise par deux députés, membres du Rassemblement Démocratique Africain : l’ivoirien Félix Houphouët-Boigny et le sénégalais Senghor, lequel proposait dès 1955 une Union française. Ils veulent un couple développement capitaliste et démocratie, afin de réunir les « conditions nécessaires au passage à l’avènement d’une bourgeoisie africaine »[27]. Ce projet gradualiste, qu’on peut aujourd’hui taxer de néocolonial, « avait besoin de mobiliser pour son usage des forces sociales qui aspiraient à une liberté et une indépendance effective »[28] écrit Yves Bénot. Selon lui, « la théorie senghorienne n’est que l’expression mystifiée du sous-développement persistant »[29]. Elle s’adresse en réalité à une bourgeoisie africaine, à la fois rassurée par son conservatisme, et galvanisée par un chauvinisme sous-jacent, qui sape du même coup toute ambition d’unité africaine. Pour Bénot,

 

la théorie [du socialisme africain] elle-même n’implique aucune conclusion pratique, aucune action précise, elle est là pour conserver. Conservant, elle trouve aisément un écho favorable chez ceux qui sont intéressés au maintien non de l’égalité primitive, mais de leurs privilèges : chefs, féodaux civils ou religieux, notables de toutes sortes.[30]

 

Hors d’Afrique non plus, ce socialisme africain ne dérange guère. Son écho auprès d’une bourgeoisie et d’autorités françaises peu décidées à abandonner leur influence en Afrique et qui, depuis peu, raffolent d’art nègre, ne recueille que les éloges. Ainsi ne s’étonnera-t-on pas que Senghor écrive : « On oublie, trop souvent, le rôle majeur que joua le général de Gaulle dans la naissance et l’organisation de la francophonie. C’est pourquoi je tiens à commencer par lui rendre justice »[31]. Certes, il ne semble être ici question, comme toujours, que de culture et linguistique. Mais, si on commence à identifier le rôle mystificateur des enjeux culturels dans la pensée senghorienne, on doit pouvoir comprendre ce que cela cache. Une apologie de « la loi constitutionnelle du 4 juin 1960 qui instaure une communauté conventionnelle, régie par des accords bi- ou multilatéraux entre la France et les nouveaux États », c’est-à-dire ce qu’on appelle aujourd’hui la Françafrique, « financièrement soudée à la métropole française par le franc CFA. »[32] Si l’incompétence de Senghor en matière économique est notoire, tout cela, il ne le méconnaît pas. Simplement, il avance que « dans la pensée française, la culture, c’est-à-dire la création ou l’esprit d’une civilisation, est la condition sine qua non, mieux, le facteur le plus efficace du développement scientifique et technique, partant, économique et social. »[33] Cette fétichisation de l’esprit français ne fait que creuser le fossé qui sépare les anciennes colonies des différents empires, au détriment de l’ambition panafricaine. D’autant qu’on peine à comprendre à quel titre la maîtrise de telle langue européenne plutôt que telle autre induirait nécessairement, plus que les conditions matérielles de la jeune nation, un modèle de développement particulier. A fortiori si celui-ci est aussi évidemment caduc, pour ne pas dire absurde, que ce qu’esquisse Senghor.

 

 

2. Nkrumah : du marxisme-léninisme au consciencisme

Ce sont les mêmes problématiques que celles soulevées par Senghor qui feront naître à la pensée le jeune philosophe Kwame Nkrumah, qui devait devenir le premier président du Ghana : il y a une lutte à mener contre la dévalorisation de la civilisation et de la personnalité africaine. C’est en ce sens qu’en 1945, il élabore « à l’université de Philadelphie une thèse sur “l’esprit et la pensée dans la société primitive” […], dont le sous-titre précise d’emblée qu’il s’agit d’une “étude éthno-philosophique sur les peuples Akans de la Côte d’Or, en Afrique de l’Ouest” »[34]. Les urgences de la vie politique ne lui laisseront pas le loisir de l’achever. Le champ de l’anthropologie et, au-delà, des sciences humaines, est important pour Nkrumah puisque sa pensée s’est en grande partie constituée à son contact. Il y a même des raisons de penser que c’est lui qui est à l’origine du terme « ethnophilosophie », qui connaîtra une certaine postérité. Pour les auteurs francophones qui l’emploieront au cours de la décennie suivante, c’est le caractère ethnique qui prime sur la pensée ; l’objet d’étude n’est alors que l’ensemble de propositions métaphysiques propres à la vision du monde d’une tribu donnée. Mais, chez Nkrumah, on pourrait dire que c’est a contrario la dimension propre à la philosophie qui prime sur la détermination ethnique : il s’agit de parvenir, par-delà les différences raciales, culturelles, linguistiques, à esquisser une représentation du monde propre à la race humaine en général[35]. De là à dire qu’il s’agit de s’intéresser à un certain fonctionnement du représenter lui-même, c’est-à-dire de la conscience humaine en général, il n’y a qu’un pas, qui sera effectué par les écrits ultérieurs du ghanéen. L’ethnologie, selon Nkrumah, est née dès lors qu’il a fallu emboiter le pas à un impérialisme fondé sur des exigences économiques. Elle fonctionne dès lors comme un discours qui, a posteriori, justifie l’infériorité d’Africains déjà colonisés et marqués par la mémoire de la traite[36]. L’un des points sur lesquels Nkrumah a insisté fortement, c’est la prise en considération des rapports de pouvoir à l’origine des disciplines scientifiques et des courants philosophiques.

Certains commentateurs ont pu isoler des ruptures dans sa pensée[37], des zigzags entre un socialisme inspiré du marxisme-léninisme et une doctrine politique plus proche du courant modéré que l’on appelle ordinairement « socialisme africain ». Une telle analyse fait en réalité fi de la façon dont l’auteur lui-même a tenté de théoriser sa gouvernementalité.

 

[…] tentant d’établir une vie nouvelle dans une société nouvelle, fondée sur des modes de production modernes, nous devons admettre que nous sommes dans une période mouvante et que nos décisions ou attitudes ne peuvent pas être immuables. Nous devons adapter sans cesse nos esprits, sans jamais perdre de vue nos principes ni notre objectif socialiste avoué.[38]

 

« Dès le départ, les initiatives de Nkrumah, tant sur le plan de la réflexion que de l’action politique, témoignent de l’enracinement premier de sa pensée dans le marxisme-léninisme »[39] souligne Manga Kuoh. Prenant ces remarques en compte, on pourrait proposer de lire l’ensemble de l’itinéraire de Nkrumah à partir de sa proposition philosophique fondamentale qui, si elle n’apparaît qu’à la parution de Consciencism en 1964, dénote bien la constance d’un itinéraire intellectuel. Ce que l’auteur appelle « consciencisme philosophique » se propose tout d’abord comme une méta-philosophie, ou une anthropologie de la philosophie. Dans la lignée directe de Marx, il renvoie les concepts philosophiques à leur fondamentale hétéronomie, c’est-à-dire à leur double relativité historique et géographique. Nkrumah affirme que les systèmes philosophiques sont datés, et situés, et il s’autorise cette analyse depuis un point de vue culturellement hybride, depuis les « sentiments contradictoires »[40] qui résultent de ce que W.E.B Du Bois appelait la « double conscience ». Cette situation correspond à la coexistence, chez un seul individu, de deux identités que les structures sociales et le pouvoir politique tâchent de rendre exclusive l’une de l’autre. En Kwame Nkrumah se télescopent une certaine admiration, une déférence pour les doctrines des philosophes occidentaux, et une défiance à l’égard de ce qu’on peut concevoir comme le mensonge fondamental sur lequel s’est bâti le système d’enseignement voué à les restituer. L’université, en effet, tâche de leur conférer la grâce de l’universalité. Elle se trompe. Le faux universalisme qui marque l’ethnocentrisme de ce type d’enseignement passe, paradoxalement, par une tentative de soustraction de la pensée à ses conditions matérielles : « tout se passe comme si ces systèmes n’étaient pour [les universités] que des propositions entre lesquelles il y aurait des rapports logiques. »[41] Seul l’étudiant des colonies, de par sa condition singulière, est en mesure de prendre conscience de cette mystification : si l’effet de l’appropriation d’une théorie est l’oubli de sa propre situation de colonisé, de son propre statut juridique, alors il y a un problème, et il est nécessaire d’intervenir d’une certaine façon dans la théorie pour se l’approprier autrement.

Pour autant, cette capacité à identifier le mensonge est loin d’être un caractère qui serait inhérent aux colonisés et caractériserait une plus grande réflexivité qu’ils seraient, d’emblée, capables de mettre en œuvre. Bien au contraire, le pseudo-universalisme dont s’habille l’enseignement de la philosophie occidentale sert à embrigader de futurs administrateurs coloniaux, « prêts à accepter n’importe quelle théorie de l’universalisme, à condition qu’elle fût exprimée en termes vagues, du type pâte de guimauve. » Et ceux-là sont d’autant plus dociles qu’ils se croient appartenir à une civilisation qui les dépasse de loin. Nkrumah les décrit encore, qui « ramenaient de l’université une attitude entièrement étrangère à la réalité de leur peuple et de sa lutte. Quand ils rencontraient des doctrines de type militant, comme celles du marxisme, ils les réduisaient à d’arides abstractions, à des subtilités oratoires. »[42] Contre cet usage libéral insidieux, la perspective des colonisés impliqués dans le combat nationaliste ouvre sur un matérialisme ; ainsi, les philosophies « se présentent in situ non comme des systèmes abstraits et éthérés, mais comme des armes intellectuelles à usage social. »[43] Et, originellement, toutes les philosophies peuvent être lues comme procédant d’un tel souci. On pourrait dire que Nkrumah en propose une lecture à la fois anthropologique et politique. En effet, toute philosophie, toute cosmogonie même, est le fruit d’un contexte socioculturel qui l’a vue naître : « La philosophie a une sociologie qui lui est propre »[44]. La philosophie est une pratique sociale, et ne se contente donc pas d’être un témoignage ou un document : elle est constituée par des rapports sociaux et trouve aussi une valeur prescriptive par rapport au contexte qui l’a vue naître. Et le penseur ghanéen de se fendre d’une relecture matérialiste de l’histoire de la philosophie par laquelle il cherche à mettre en valeur, par exemple, l’opposition entre la philosophie leibnizienne, dont l’harmonie préétablie reflète une anthropologie libérale et capitaliste, et la proposition cartésienne de l’unité de la raison, intrinsèquement socialiste, qui fit « passer le domaine du vrai de la révélation mystique à la démonstration mathématique et publique ». Il y a, pour Nkrumah, une lutte des classes dans la théorie, « un conflit social, implicite ou explicite, dans la pensée des philosophes, l’histoire de la philosophie »[45].

Ceci étant dit, Nkrumah doit également insister sur les spécificités de la situation africaine, qui exige d’être analysée différemment. Dans l’Occident colonisateur, la pensée idéaliste-capitaliste est hégémonique depuis Hegel, et une lutte acharnée contre ses postulats de base est indispensable. En Afrique, par contre, le rassemblement autour de la théorie est un enjeu de bien plus de poids. Pour Nkrumah, le socialisme africain est né de la rencontre entre la tradition communaliste et l’irruption violente de la modernité. Son idéologie doit se tenir à un croisement entre les religions chrétienne, musulmane et traditionnelle. Même si cette description est bien celle d’une sorte de syncrétisme afro-européen, le penseur ghanéen veille à faire découler logiquement le socialisme africain des identités africaines et non l’inverse. Mais le communalisme ainsi réaffirmé ne peut dès lors apparaître que comme une fabrication. L’auteur n’en est pas dupe, c’est même le sens de sa revalorisation de l’idéologie, en tant que facteur de réunification des populations séparées par le colonialisme.

 

L’émancipation du continent africain, c’est l’émancipation de l’homme […] La philosophie qui doit soutenir cette révolution sociale est celle que je me suis proposé d’appeler « consciencisme philosophique » ; le consciencisme est l’ensemble, en termes intellectuels, de l’organisation des forces qui permettront à la société africaine d’assimiler les éléments occidentaux, musulmans et euro-chrétiens présents en Afrique et de les transformer de façon qu’ils s’insèrent dans la personnalité africaine. Celle-ci se définit elle-même par l’ensemble des principes humanistes sur quoi repose la société africaine traditionnelle. La philosophie appelée « consciencisme » est celle qui, partant de l’état actuel de la conscience africaine, indique par quelle voie le progrès sera tiré du conflit qui agite actuellement cette conscience. Son fondement est le matérialisme.[46]

 

L’usage du suffixe « -isme » est ici prescriptif. Il est question de produire, dans le conflit, cette conscience africaine. La politique pensée par Kwame Nkrumah est, plus encore que celle de Senghor, celle de la réalisation matérielle de la philosophie, en tant qu’entreprise humaniste. La révolution africaine doit, littéralement, produire son propre peuple, et se présente donc comme une étatisation de la lutte nationale décrite par Fanon, dans laquelle on « assiste à un bouleversement de fond en comble des moyens de perception, du monde même de la perception.[47] » En d’autres termes, elle doit à la fois conjurer les « effets sociaux du colonialisme »[48] qui ont eu pour conséquence d’entériner l’infériorité des Nègres, et encourager la propagation de l’idéologie nkrumahiste. Comme le signale Manga Kuoh, pour le président du Ghana, la « lutte pour l’unité africaine, la croisade contre l’impérialisme et la mise en place d’une économie dominée par la propriété publique des moyens de production et de distribution constituent les trois piliers de la construction du socialisme »[49] en Afrique. Et, par conséquent, ce sont aussi les trois piliers du consciencisme. Par-delà ses échecs et des succès, la politique effectivement mise en œuvre par le Président Kwame Nkrumah, théoricien et thuriféraire du parti unique, réalisateur d’une politique éducative ambitieuse et réussie, porte la marque de cette philosophie. De même qu’un risible culte de la personnalité commencé en 1962.

Sur certains points, la position prônée par Nkrumah peut sembler paradoxale. Si, on l’a vu, il prône une sorte de reconstruction du communalisme traditionnel, il n’en juge pas moins nécessaire une transformation radicale de certaines structures sociales archaïques, accusées de freiner considérablement le développement social ghanéen. Il écrit dans L’Afrique doit s’unir :

 

Les coutumes qui exaltent les vertus de la famille étendue entretiennent la pratique du népotisme, et font de l’usage de donner et de recevoir des présents quelque chose de noble et de nécessaire, parce qu’il assure le bien être de la famille. Ces coutumes encouragent paresse et corruption, freinent le développement des capacités, s’opposent à ce sens profond de la responsabilité individuelle dont on a besoin dans une période de reconstruction nationale […] Dans la vie économique d’un pays sous-développé, les économies gaspillées pour les dépenses d’apparat, pour la célébration de fêtes religieuses traditionnelles, pour des cérémonies de mariage et des funérailles extravagantes, sont de l’argent jeté à la mer, ni plus ni moins.[50]

 

Préalable à la colonisation, ce mode de fonctionnement s’est vu réinvesti par elle et a, dans tous les cas, suivi une voie incompatible avec l’évolution globale de la société. La bourgeoisie ghanéenne, en effet, « n’est pas autonome, elle est prise elle-même dans les rets des traditions, de la pression constante d’une société qui n’était fondée ni sur l’économie monétaire, ni sur la poursuite du profit maximum, mais qui survit à l’intérieur de cette économie monétaire et capitaliste, et vient la perturber »[51]. L’éclatement de conflits sociaux se trouve ici masquée sous l’apparence d’antiques traditions. Les « couches supérieures de la société africaine, entraînées à devenir une arrière-garde locale des trusts occidentaux »[52] peine à apparaître pour ce qu’elle est. Tout un système officieux de prestige, de redistributions, d’obligations, verrouille la lutte de classes ou, en tous cas, la retarde notablement. C’est dans ce contexte que l’écrivain noir américain Richard Wright prend le président du Ghana à parti. « LA VIE AFRICAINE DOIT ÊTRE MILITARISÉE ! », écrit-il en lettres capitales, dans une optique générale que Yves Bénot qualifie de « jacobine ». Il s’agit pour Wright de bouleverser radicalement l’organisation sociale ghanéenne, et de lui substituer un modèle qui « réduirait à néant le passé fétichiste, détruirait le caractère mystique et absurde des relations familiales qui paralyse et dégrade l’Afrique. Elle mettrait fin à l’existence de ces parasites que sont les chefs qui ont trop longtemps saigné et berné un peuple crédule. C’est la seule façon, pour l’Afrique, d’accéder immédiatement au XXe siècle »[53].

Malgré la radicalité de ce discours, Paul Gilroy pointe à juste titre une certaine ambivalence dans l’attitude de Wright[54], mais plus généralement dans le rapport à la tradition qu’entretient la pensée politique noire. Dans l’argumentation de Nkrumah lui-même, les structures traditionnelles sont celles qui ont été perpétuées et transformées par le colonialisme et le néo-colonialisme. Il n’y a pas, dans la pensée politique africaine, de culture traditionnelle. Elle est irreprésentable hors de la référence conjointe à la modernité colonialiste ou socialiste ; il y a là un inextricable hybride de différentes époques. Soit il s’agit d’un idéal vers lequel il faudrait tendre ; soit il s’agit du produit d’une imposition culturelle coloniale. Dans les deux cas, l’effet de dénaturalisation est radical. Qu’ils soient « originaristes » ou modernistes, les discours sur la tradition ne témoignent en réalité que de la mort de leur objet, et de son insertion sans reste dans une logique postcoloniale.

Le projet panafricain est défendu politiquement par Nkrumah, qui prévoit dans sa constitution de 1960 la possibilité d’un abandon de souveraineté au profit d’une Union Africaine. Elle rejoint ainsi la constitution de 1958 de la Guinée de Sékou Touré qui, la première, avait envisagée cette éventualité. Le projet se matérialisera sous la forme d’une union Guinée-Ghana, qui montre qu’est possible une autre voie unitaire que la Communauté gaulliste. Une unité africaine capable de dépasser les différences linguistiques imposées par la colonisation. Seuls les Etats-Unis d’Afrique sont susceptibles de permettre le développement homogène et la planification à grande échelle qui sont les seuls remparts contre le néocolonialisme et la continuation de l’exploitation du continent. Mais de nombreux obstacles empêcheront Nkrumah de mener sa politique ambitieuse jusqu’au bout. Ses bravades à l’égard des États occidentaux lui valent de se voir refuser aides financières et investissements. Son parti unique, le CPP, se voit de plus en plus noyauté par des éléments pro-capitalistes, vénaux et souvent corrompus, pour lesquels il se montre pourtant indulgent, sans doute plus par crainte des critiques internationales que par déférence pour le modèle d’une démocratie d’opinion. De fait, la progressive perte d’influence du leader au sein de son propre parti s’accompagne du recul de l’idée panafricaine, au profit d’un chauvinisme qu’il avait en horreur, puisqu’annonciateur d’une balkanisation du continent. Nkrumah sera finalement reversé en 1966, par « deux officiers subalternes, intimement liés à l’Intelligence Service britannique »[55], alors qu’il était parti en voyage officiel à Pékin, quérir quelques conseils auprès du Président Mao.

 

Norman Ajari



[1] Bénot Yves, Idéologies des indépendances africaines, Paris, Maspero, 1969, p. 11.

[2] Mbembe Achille, De La Postcolonie, Paris, Karthala, 2000, pp. XI-XII.

[3] Bernard Charles, « Le socialisme africain : mythes et réalités », in : Revue française de science politique, vol. 15, n° 5, 1965, p. 884.

[4] Bénot Yves, op. cit., p. 17.

[5] Ziegler Jean, Main basse sur l’Afrique. La recolonisation, Paris, Seuil, 1980, p. 67.

[6] Senghor Léopold Sédar, Ce Que Je Crois. Négritude, Francité et Civilisation de l’Universel, Paris, Grasset, 1988, p. 138.

[7] Gilroy Paul, L’Atlantique noir. Modernité et double conscience (1993), trad. Charlotte Nordmann, Paris, Amsterdam, 2010, p. 179.

[8] Bénot Yves, op. cit., p. 115.

[9] Ibid, p. 229. Et on sait aussi, comme le montre Achille Mbembe dans le premier chapitre de De La Postcolonie qu’il y a eu, en retour, réappropriation par les anciens indigènes des méthodes coercitives de la gouvernementalité coloniale. Boucle de la violence.

[10] Fanon Frantz, Les Damnés de la terre (1961), Paris, La Découverte, 2002, p. 56.

[11] Par exemple : « Nous sommes fatigués de vivre sous cette tyrannie. Nous ne pouvons plus supporter de voir nos femmes et nos enfants emmenés pour être utilisés par les sauvages blancs. Nous ferons la guerre. Nous savons que nous mourrons, mais nous voulons mourir. Nous voulons mourir. » Ce chant congolais est cité dans M’Bokolo Elikia, « Afrique centrale : le temps des massacres », in : Ferro Marc (dir.), Le Livre noir du colonialisme, Paris, Robert Laffont, 2003, p. 590.

[12] Gilroy Paul, op. cit., p. 278.

[13] Senghor Léopold Sédar, op. cit., p. 139.

[14] Adotevi Stanislas, Négritude et négrologues, Paris, Union générale d’éditions, 1972, p. 153.

[15] Villasante Cervello Marielle, « La Négritude : une forme de racisme héritée de la colonisation française ? », in : Ferro Marc (dir.), op. cit., p. 989.

[16] Cf. Hajjat Abdellali, Les Frontières de l’« identité nationale ». L’injonction à l’assimilation en France métropolitaine et coloniale, Paris, La Découverte, 2012.

[17] Senghor Léopold Sédar, op. cit., p. 22. Italiques dans l’original.

[18] Césaire Aimé, Nègre je suis, nègre je resterai. Entretiens avec Françoise Vergès, Paris, Albin Michel, 2005, p. 28.

[19] Diagne Souleymane Bachir, Bergson postcolonial, Paris, CNRS Éditions, 2011, p. 24.

[20] Adotevi Stanislas, op. cit., p. 29.

[21] Dorlin Elsa, La Matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la nation française (2006), Paris, La Découverte, 2009, p. 230.

[22] Senghor Léopold Sédar, op. cit., p. 143.

[23] Ibid., p. 151.

[24] Senghor Léopold Sédar, Pierre Teilhard de Chardin et la politique africaine, Paris, Seuil, 1962, p. 15.

[25] Kuoh Manga, Palabre africaine sur le socialisme, Paris, L’Harmattan, 2009, p. 52.

[26] Adotevi Stanislas, op. cit., p. 61.

[27] Bénot Yves, op. cit., p. 69.

[28] Ibid., p. 70.

[29] Ibid., p. 191.

[30] Ibid., p. 192.

[31] Senghor Léopold Sédar, Ce Que Je Crois, op. cit., p. 158.

[32] Khiari Sadri, La Contre-révolution coloniale en France. De De Gaulle à Sarkozy, Paris, La Fabrique, 2009, p. 67.

[33] Senghor Léopold Sédar, Ce Que Je Crois, op. cit., p. 173.

[34] Mangeon Anthony, La Pensée noire et l’Occident, Paris, Sulliver, 2010, p. 90.

[35] Cf. Hountondji Paulin J., « Knowledge as a development state », in : Wiredu Kwasi (dir.), A Companion to african philosophy, Malden, Blackwell, 2004, p. 533.

[36] Nkrumah Kwame, L’Afrique doit s’unir (1963), trad. L. Jospin, Paris, Présence Africaine, 2009, pp. 17-18 et Leclerc Gérard, Anthropologie et colonialisme, Paris, Fayard, 1972, p. 180.

[37] Cf. Taiwo Olufemi « Post-Independance african political philosophy », in : Wiredu Kwasi, op. cit., pp. 243-260.

[38] Nkrumah Kwame, op. cit., p. 156.

[39] Kuoh Manga, op. cit., p. 96.

[40] Nkrumah Kwame, Le Consciencisme (1964), Paris, Présence Africaine, 2009, p. 10.

[41] Ibid., p. 11.

[42] Idem.

[43] Ibid., p. 69.

[44] Ibid., p. 57.

[45] Ibid., p. 69.

[46] Ibid., p. 98. Italiques dans l’original.

[47] Fanon Frantz, L’An V de la révolution algérienne (1959), Paris, La Découverte, 2011, pp. 80-81.

[48] Nkrumah Kwame, L’Afrique doit s’unir, op. cit., p. 50.

[49] Kuoh Manga, op. cit., p. 101.

[50] Cité dans Bénot Yves, op. cit., p. 198.

[51] Ibid., p. 229.

[52] Ibid., p. 277.

[53] Cité dans ibid., p. 279.

[54] Gilroy Paul, op. cit., p. 271.

[55] Ziegler Jean, op. cit., p. 101.

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