Lucidité

L’islamophobie : ou le fond de commerce fructueux

Depuis les premières affiches du Front National il y a une vingtaine d’années sur lesquelles on pouvait voir une mosquée avec le slogan « DANS 20 ANS LA FRANCE SERA MUSULMANE ! », le filon de l’islamophobie, qui n’était alors qu’un fond de commerce exploité et non réservé à l’extrême droite , va s’avérer au fil des ans une affaire juteuse politiquement, sur laquelle vont se ruer la droite , la gauche, les paternalistes blancs et même nos basanés.

Paradoxalement même ceux qui ont alimenté pendant des années ce fond de commerce et ces diabolisations criminelles, vont profiter de la vague islamophobe actuelle pour tenter de se racheter une virginité démocratique et droit de l’hommiste.

Sans remonter aux prémisses de cette islamophobie hexagonale qui remonte aux temps des croisades , puis des colonies en passant par la Révolution Iranienne puis par l’islamisation par Pierre Mauroy , alors premier ministre , de la lutte sociale de nos parents dans le domaine de l’automobile, en les traitant d’agitateurs Khomeynistes, pour finir par un rapide survol avec le fameux débat sur l’identité nationale impulsé en réalité lors de la dernière campagne présidentielle, et pas seulement ces derniers mois.

En effet lorsque le candidat Sarkozy avait décidé de siphonner les voix du FN lors de la dernière campagne présidentielle, il décomplexait alors bon nombre d’hommes et de femmes politiques à l’image de Ségolène Royal qui lui emboîta le pas sur la question de l’identité nationale du drapeau, de la Marseillaise et pour finir en pleine campagne par stigmatiser les femmes musulmanes voilées en les amalgamant avec les femmes violées et excisées .

Puis viendra la campagne pour les élections régionales initiée en vérité bien avant avec le fameux débat sur la « Burqa » puis par celui sur l’identité nationale qui n’avaient pour but que de continuer la stigmatisation des musulmans entreprise lors des présidentielles en particulier.

Nous avons alors assisté à un véritable déchainement raciste et islamophobe sans précédent , entretenu par des politiques et des intellectuels en passant par les groupes identitaires ou les partis politiques, des attaques symboliques et physiques d’une rare violence et avec une périodicité qui interroge.
La criminalisation du musulman est dorénavant inscrite sur les murs de la République (d’ailleurs les affiches du Front National avec les minarets et le drapeau algérien, continuent à tapisser nos murs alors qu’elles ont été interdites par la justice) ce qui renforce dans le subconscient collectif l’idée de la dangerosité de ces musulmans pour la France envahie par les minarets et le drapeau algérien très significatif dans notre histoire commune.

Après cette campagne électorale et les résultats tristement historiques pour les musulmans de France ( le FN a dépassé les 22% au Nord et au Sud du pays et les taux d’abstention dans nos quartiers ont battu tous les records) , nous voyons se dessiner d’autres campagnes islamophobes et racistes annoncées plus ou moins explicitement par un certain nombre de ténors de la droite dont certaines figures nous ont affirmé que le redressement de la France passait par le vote de la loi contre la « Burqa » et d’autres par le fait qu’il fallait revenir aux fondamentaux qui seraient le sécuritaire et l’identité nationale.

L’analyse faite par ces hommes et femmes consiste à nous dire que si le FN a progressé entre les deux tours , et s’il revient en force, c’est parce que nous n’avons pas tapé assez fort sur les nouveaux bouc-émissaires que sont devenus ces musulmans, et qu’il va falloir s’y mettre pour regagner cet électorat égaré à l’extrême droite. Beau programme face à un chômage galopant, une crise persistante et un avenir incertain ou bouché !
La droite qui s’est brulée les doigts et a perdu des plumes avec ces débats instrumentalisés ne veut pas tirer les bonnes leçons et s’entête en attisant la haine entre les composantes de la population et des lendemains dangereux .
La gauche quand à elle s’est contentée lors de ces débats nauséabonds de nous dire que le moment était mal choisi et qu’il s’agissait d’une manœuvre politicienne et électoraliste ce qui sous tendrait que si ces débats et ces stigmatisations avaient lieu lors d’une autre période ils seraient les bienvenus, ou pour le moins compris ou acceptés. Pendant ce temps , une grande partie de cette gauche s’est permis de critiquer le choix du NPA du Vaucluse de présenter une candidate voilée pour les élections régionales, le Quick Halal, ou de nous présenter quelques têtes basanées (nous avons même eu doit aux musulmans bien pratiquants et tout et tout !) pour draguer les banlieues avec leurs noirs et arabo-musulmans , sans présenter la moindre solution aux problèmes endémiques que nous vivons dans nos quartiers populaires et banlieues depuis plus de 30 ans, et dans lesquels la gauche a autant de responsabilité que la droite.

D’ailleurs un bon nombre de députés de gauche ont contribué , au sein de la commission « Burqa » initée par un député communiste , à jouer de l’islamalgame et de la criminalisation d’une partie de la population, ce qui a permis à certains d’entre eux d’obtenir une notoriété qu’ils n’avaient même pas imaginée en rêve.

Pour compléter le panorama islamophobe et faussement islamophile nous ne pouvons pas passer sous silence les tentatives de rachat de virginité de la part de certaines personnalités (Bernard Henri Levy, Elisabeth Badinter, Redecker, Sifaoui , Taguieff, Gluksman, etc…et certains satellites du CRIJF) qui ont l’outre-cuidance de signer une pétition contre les affiches du Front National alors qu’à longueur d’années nous subissons leurs attaques dont les effets consistent à nous jeter en pâture à l’extrême droite et à nous mettre au ban de la société et du vivre ensemble.

Comme nous l’avons constaté l’islamophobie est donc un bon filon électoral, qui a la particularité d’être exploité par la classe politique dans son ensemble, mais aussi et malheureusement par certains acteurs en mal de troupes et qui viennent faire leur marché dans ce vivier important fort de plusieurs millions de citoyens, en vue d’arriver à leurs fins politiques. Le paternalisme que subit la communauté musulmane de France n’est en effet pas toujours blanc comme voudraient nous le faire croire certains. Et le business qui consiste soit à criminaliser les musulmans pour faire carrière politique, soit à les caresser dans le sens du poil pour faire carrière en tant que pseudo-spécialiste, ou enfin de s’ériger en leur porte parole ou leur symbôle en empruntant parfois de manière trompeuse à leur accoutrement vestimentaire ou apparence : (bandana, foulard ou barbe) ne sont que des pièges qui méritent d’être pris sérieusement en considération pour éviter des lendemains douloureux, et éviter aux musulmans de France d’être représentés par des charlatans, ce qui est malheureusement trop souvent le cas.

Abdelaziz Chaambi Lyon le 25 Mars 2010

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