Les massacres de l'Occident ont lieu avec ou sans le soutien des Nations Unies

Nouveau carnage en Libye.

Les massacres de l’Occident restent impunis. Il n’existe pas de mécanisme institutionnel international pour empêcher cela. Quelques jours à peine après le début des opérations en Lybie, nous découvrons déjà le nombre de victimes civiles des bombes occidentales.

Le discours impérial hégémonique occidental ne change pas. La formule se répète. D’abord, on accuse son adversaire d’être sur le point de commettre un « génocide » (peu importe la réalité de la chose), en dénonçant la possession présumée d’armes de destruction massive pour tuer des gens sans discernement. Ensuite, la charge est accompagnée par une comparaison avec « Hitler ». Enfin, les médias s’occupent de convaincre les opinions publiques de la nécessité de partir en guerre avec ou sans le vote de l’ONU. Les facteurs récurrents (et qui ne doivent rien au hasard), sont l’immense richesse pétrolière du pays en question ainsi que l’incapacité de l’occident à contrôler le régime en place.

Kadhafi et la Libye sont la deuxième partie d’un film d’horreur fabriqué aux Etats-Unis que nous avons déjà vu avec Saddam Hussein et l’Irak. Ni l’un ni l’autre ne sont des saints. Ce sont des dictateurs impitoyables qui ont fluctué au cours de leur longue et autoritaire trajectoire entre conflit et collaboration face à l’Occident. En dépit de leur rhétorique anti-impérialiste creuse, ils ont tous deux, à un moment donné de leur carrière, effectué du sale boulot pour l’Occident. Hussein, a fait pendant huit ans la guerre de la CIA contre l’Iran avec le soutien financier et militaire occidental. Khadafi s’est réconcilié avec l’Occident, servant de centre de torture pour la CIA dans la « guerre contre le terrorisme » et de centre de rétention des candidats africains à l’exil en Europe dans la « guerre contre les immigrés ». Ces deux dictateurs montrent que l’Occident n’oublie ni ne pardonne facilement. Peu importe leurs efforts de conciliation, peu importe de sale boulot accompli, on finit toujours par leur présenter l’addition.

La question est : pourquoi dans les pays où des actes de génocide ou du moins des massacres aveugles sont réellement commis, l’Occident ne bouge jamais alors que dans d’autres, il intervient ouvertement ? Il a traîné les pieds lors des récentes révolutions arabes contre Ben Ali et Moubarak, qui ont tous deux joué le rôle de marionnettes néocoloniales pendant des décennies. Pas de réaction non plus face aux meurtres du roi de Bahreïn et du président Ali Abdullah Saleh du Yémen sur leurs populations respectives. Ces derniers ont tiré à l’aveuglette sur des manifestants, tuant des civils, sans rencontrer d’objection sérieuse et ils reçoivent maintenant l’aide militaire de la monarchie fondamentaliste pro-occidentale d’Arabie Saoudite. Dans ces cas, l’Occident fait des déclarations creuses, regarde ailleurs, et, de fait, finit par soutenir la répression de ces régimes contre leurs peuples.

La logique des accusations contre Kadhafi pourrait ausi bien être utilisée contre Ali Abdullah Saleh, au Yémen et contre le Roi de Bahreïn. Comment l’Occident choisi-t-til ses interventions ? Pourquoi n’y a-t-il pas eu de bombardement ni d’action militaire occidentale, pourquoi n’avons nous pas entendu la la voix des Nations Unies contre les tueries de Ben Ali, de Moubarak, d’Ali Abdullah Saleh et du Roi de Bahreïn ? Deux éléments entrent en jeu : la richesse en pétrole du pays et le caractère pro ou anti-occidental du dictateur qui perpétue les exactions. Cette hypocrisie répond à une logique mafieuse. Tels des chefs de gang, les empires occidentaux disent en substance : « Vous êtes avec moi, inconditionnellement, à 100 % ou vous êtes contre moi. 95 %, ce n’est pas suffisant. Les 5 % qui restent sont assez pour liquider le dictateur de service. Ce fut le destin du général Noriega au Panama, de Leonidas Trujillo en République dominicaine, de Saddam Hussein en Irak et, à présent, de Kadhafi en Libye.

L’hypocrisie occidentale atteint des sommets face au génocide perpétré par Israël contre les Palestiniens. Les arguments utilisés contre Kadhafi s’appliquent aussi, dans une mesure autrement plus grande, contre Israël. La violation flagrante des résolutions des Nations Unies et du droit international, les invasions des pays voisins n’empêchent pas l’Occident d’accorder au colonialisme sioniste son soutien inconditionnel, son aide économique et militaire ainsi que le droit de veto à l’ONU. Les crimes du sionisme sont incomparablement plus graves que ceux de Kadhafi, et pourtant, l’Occident ne bouge pas le petit doigt contre Israël.

L’intervention occidentale menée par les Etats-Unis, la France et l’Angleterre contre la Libye montre que l’hypocrisie occidentale ne connaît pas de limites. La banalisation du mot « génocide » met en lumière tout le cynisme de ces pays. On accuse de génocide des dictateurs qui ne sont pas inconditionnellement alliés à l’Occident tout en ignorant délibérément les massacres et les crimes contre l’humanité lorsqu’ils sont le fait d’un dictateur ou d’un régime pro-occidental.

D’où le manque de crédibilité de l’Occident dans le monde d’aujourd’hui, y compris lorsque son interventionnisme avance masqué sous les traits de l' »intervention humanitaire » en faveur de la « démocratie ». Ses « Interventions humanitaires » ont l’odeur du sang et aussi celle du pétrole. De tous les récents soulèvements populaires contre les dictateurs du Moyen-Orient, le seul qui a reçu le soutien inconditionnel des empires occidentaux et son appui militaire est celui qui s’oppose à l’unique dictature que l’Occident ne soutient pas : celle de Kadhafi. L’Occident a essayé de sauver tous les autres régimes des mouvement populaire démocratique.

Je ne dis pas qu’il ne faut pas soutenir le mouvement démocratique populaire contre la dictature de Kadhafi en Libye. Il s’agit de le soutenir sans interventionnisme impérial occidental. Mais à vendre son âme à l’Occident, le mouvement populaire démocratique en Libye finira par tout perdre. La seule chose que cette intervention ait réussi, c’est à hypothéquer l’avenir de ce mouvement afin de s’assurer que des compagnies occidentales auront le contrôle du pétrole et de créer un nouveau régime pro-occidental.

L’interventionnisme occidental a donné raison à Kadhafi. Au début des soulèvements populaires contre son régime, il a accusé ses participants d’être des terroriste islamiques pro-Al-Qaïda, dans l’espoir que l’Occident le soutiendrait. Quand il a vu que cela ne donnait aucun résultat, il les a qualifié de mouvement pro-occidental qui chercherait à céder le pétrole aux compagnies pétrolières occidentales. La combinaison de l’entêtement inflexible de Kadhafi contre toute réforme démocratique et de celui des compagnies pétrolières occidentales qui cherchent à capitaliser sur la crise en Libye, a fini par tragiquement lui donner raison. Le mouvement populaire en Libye est hypothéqué à vie. Rien de bon pour la lutte pour la libération et la décolonisation des peuples ne sortira de ce conflit, quel qu’en soit le vainqueur.

Rosa L. Blanc

Source : Groupe décolonial de traduction

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