La présidente du Front national a passé une grande partie de la journée au Barcarès (Pyrénées-Orientales) au milieu de centaines de rapatriés d’Algérie réunis en forum. Il s’agissait à l’évidence de s’assurer le vote d’un groupe acquis à la droite, et dont M. Sarkozy avait rallié une bonne partie à sa cause en 2007.
Les pieds-noirs pensent avoir été « baladés », a dit Mme Le Pen, candidate à la présidentielle de 2012, année qui verra aussi le cinquantième anniversaire de l’indépendance algérienne et de l’exode des Français.
« Si je suis élue présidente de la République, il est bien entendu que je réglerai d’une manière définitive tous les problèmes liés à votre exode forcé, tant d’un point de vue juridique que pécuniaire ou moral », a-t-elle promis à un auditoire pour une très grande part favorable.
Mme Le Pen a joué sur toutes les cordes sensibles des rapatriés. Elle a déposé une gerbe devant une stèle à la mémoire de leurs morts. Elle a entonné avec eux le Chant des Africains. Avec son compagnon Louis Aliot, fils de rapatriée, elle a exalté le souvenir de l’Algérie française. Avec lui, elle a dénoncé les « manipulateurs de l’Histoire ». Elle a évoqué les massacres de pieds-noirs et de harkis, la « tragédie » que demeure la guerre d’Algérie, « l’erreur tragique » que fut le départ de centaines de milliers de Français, les douleurs de l’exode.
Elle a invoqué la figure de son père, l’un des quelques députés à avoir démissionné pour aller combattre en Algérie.
« Mes amis rapatriés et harkis, mon père a toujours été à vos côtés hier, soyez assurés de mon entier soutien aujourd’hui et de ma détermination à vous rendre enfin justice », a-t-elle dit.
Elle a fait plusieurs promesses. Si elle est élue, l’Etat français reconnaîtra ses responsabilités vis-à-vis des rapatriés. Les questions en suspens comme celle des indemnisations seront résolues par une loi-cadre. Elle a réclamé le rétablissement de l’alinéa controversé de la loi 23 février 2005 qui disait les mérites de la colonisation et qui a été « piteusement et servilement retiré en 2006 sous la pression de quelques bobos ».
Mme Le Pen savait accéder là à certaines des exigences primordiales de l’Usdifra, son hôte et l’une des innombrables organisations de pieds-noirs.
Elle a suscité une ovation debout quand elle a plaidé l’abrogation de la double nationalité et surtout quand elle a touché directement au coeur: « J’exigerai en tout premier lieu le respect de vos morts et des cimetières que vous avez laissés là-bas. Je bannirai la date du 19 mars 1962 de l’histoire de France ». Cette date est celle du cessez-le-feu, récusée par les pieds-noirs.
Les pieds-noirs font partie des groupes dont la droite et l’extrême droite vont se disputer les faveurs. Un électeur pied-noir sur trois aurait déjà voté au moins une fois pour le Front, dit Eric Savarese, professeur en sciences politiques.
Le forum du Barcarès verra donc passer d’ici à dimanche les émissaires ou les messages des différentes composantes de la droite, y compris l’UMP.
Cependant s’assurer le vote des pieds-noirs n’est pas chose aisée. La représentation est éclatée. « Les pieds-noirs sont des Français comme les autres », a dit Mme Le Pen elle-même pour signifier qu’ils ne se détermineraient pas seulement en fonction de leur identité.
Ainsi le compagnon de Mme Le Pen a eu plus de succès quand il a critiqué le film Indigènes et Jamel Debbouze que quand il a fait le lien entre une décolonisation mal menée et les questions actuelles de l’immigration.
AFP
Source : 20 minutes