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Le P.I.R. : Un parti de communautés et d’individus

Un parti, c’est comme une maison. Son architecture n’est pas déterminée par des considérations techniques ; ou seulement de manière secondaire. Un espace d’habitation est conçu à partir d’une culture et de coutumes ; il est le reflet des relations sociales – notamment familiales – propres à telle ou telle société. Eh bien, un parti, c’est exactement pareil.

Il n’y a pas de modèle de parti standard ou universel. L’architecture d’un parti – ses modalités d’organisation et de fonctionnement – n’est pas neutre. Elle est le reflet du système politique en place mais elle exprime aussi la démarche adoptée par rapport à ce système politique. En France, les partis sont organisés sur le modèle de la République, c’est-à-dire sur la base du dogme selon lequel la nation serait un corps politique composé de citoyens, tous individus identiques et égaux, indépendamment de leurs différences sociales, culturelles ou autres. En d’autres termes, les partis républicains sont des partis d’individus abstraits et atomisés ; ils ne reconnaissent pas l’existence de communautés particulières ([En vérité, de même que, dans la République, le « vrai Français » est blanc, dans les partis républicains, les « vrais » adhérents doivent aussi être blancs. Le parti républicain ne reconnaît pas les communautés mais défend la communauté blanche.)].

Le parti que nous voulons construire a pour finalité de promouvoir l’égalité réelle entre les individus indépendamment de leurs couleurs, de leurs origines et de leurs cultures mais aussi, de manière indissociable, il a pour objectif la transformation du système politique afin que soit reconnue l’égale dignité des différentes communautés au sein de la société, de l’Etat et de la nation. Ce projet politique doit commencer à prendre forme dans l’organisation même du parti décolonial, ses mécanismes de fonctionnement et de prises de décision. Le PIR devra donc être à la fois un parti d’individus et un parti de communautés. Il s’organisera de façon à pouvoir traduire à la fois l’unité de conditions, d’intérêts et d’aspirations de l’ensemble des indigènes, et la diversité des parcours historiques, des modes d’insertion dans la société française, des cultures et des croyances, des différentes communautés indigènes. Un Noir, un Antillais, un Arabe, un musulman, sont tous traités comme des indigènes mais ils ont aussi des histoires propres, des spiritualités particulières, des exigences spécifiques, qui devront s’exprimer également dans la politique du PIR. En tant que parti décolonial, le PIR se devra, par exemple, d’être un espace qui permette à sa composante musulmane d’affirmer son islamité, de penser et d’exprimer sa politique à travers l’islam, comme à sa composante noire d’exprimer sa condition historique propre. Par ailleurs, la République discrimine les indigènes tous autant qu’ils sont mais elle développe aussi entre eux des hiérarchisations et les met en concurrence.

Or, l’enjeu stratégique premier du PIR est justement d’unifier l’ensemble des indigènes, de surmonter tout ce qui les oppose les uns aux autres, d’empêcher qu’en son propre sein ne se reproduisent les hiérarchisations créées par la colonisation ou par la politique de division menée actuellement par les forces blanches. Il nous faudra donc concevoir le PIR comme un parti composé d’individus unis par de mêmes objectifs politiques, et comme un parti qui intègre dans ses principes d’organisation, ses mécanismes de décision et d’expression publique, la possibilité pour ceux de ses membres qui le souhaiteraient de constituer, parallèlement à leur participation aux instances communes à l’ensemble des militants, des regroupements communautaires significatifs du point de vue de la lutte décoloniale.

Walou, septembre 08

Cet article a été publié dans le numéro 13 (octobre 08) de « L’Indigène de la république ».

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