« On peut modifier la méthode utilisée pour atteindre un objectif, mais l’objectif, lui, ne varie jamais. Ce que nous voulons par tous les moyens, c’est une liberté absolue, une justice absolue, une égalité absolue. Cela ne varie jamais. Etre absolument et immédiatement reconnus et respectés en tant qu’êtres humains, voilà ce que nous voulons tous, et cela ne varie pas. Peu importe votre appartenance – ce qui compte, c’est que vous vouliez être reconnus pour des êtres humains et respectés en tant que tels. »(Malcolm X, 1964)
Cinq années après le lancement de l’Appel des Indigènes de la République (janvier 2005) qui promettait la convergence au sein d’une dynamique politique autonome des luttes de l’immigration coloniale, des descendants de déportés africains, des quartiers populaires et des antiracistes anticolonialistes, le Parti des Indigènes de la République (P.I.R.) est né.
Il nous a fallu cinq longues années pour que le Mouvement des Indigènes de la République (MIR), première forme organisée issue de l’Appel de 2005, se métamorphose en un véritable parti, capable de mener le combat pour la libération décoloniale. Cinq longues années qui ont suivi les luttes pour empêcher l’adoption d’une loi inique contre le port du voile à l’école, auxquelles ont succédé la bataille contre la loi du 23 février sur le « rôle positif » de la colonisation, et, surtout, la grande révolte des quartiers populaires qui a permis l’émergence d’une nouvelle génération indigène prête à s’engager sur le front de la lutte politique.
Il nous a fallu cinq longues années consacrées à assimiler l’héritage de ceux qui nous avaient précédés dans ce combat, cinq années d’action et de lutte, cinq années d’élaboration et de réflexion, cinq années d’efforts d’organisation et de rassemblement, nous ont été nécessaires pour qu’enfin puisse se tenir le Premier Congrès, le Congrès constitutif, de ce parti dont nous espérons qu’il permette à nos luttes de franchir un nouveau palier.
Nous avons placé ce Congrès sous les auspices de Malcolm X, tout d’abord pour rendre hommage à ce combattant infatigable, assassiné le 21 février 1965. Nous avons tenu ainsi à souligner l’unité du combat antiraciste décolonial par delà les frontières. Surtout, la mémoire de Malcolm X nous est chère parce qu’il a mis au centre de ses préoccupations la nécessité de l’autonomie politique des peuples opprimés au cœur des métropoles coloniales et l’impératif d’agir sur le terrain politique.
C’est à cet impératif que nous avons voulu répondre avec la fondation du PIR : il n’est plus suffisant de résister au jour le jour contre les différentes formes de discriminations raciales, contre la négrophobie et l’islamophobie, les violences policières, les inégalités, etc., on ne peut plus se contenter d’affirmer notre solidarité avec les autres peuples opprimés, on ne peut plus se résoudre à faire confiance aux partis existants pour prendre en charge nos aspirations. Désormais, nous devons investir pleinement l’arène politique, assumant totalement la légitimité de notre droit à transformer la France et ses institutions. Nous ne serons les Arabes et les Noirs de service de personne ! Le Parti des Indigènes sera notre propre parti.
Pour la première fois au sein de l’hexagone, le PIR constituera un parti où, sans occulter les spécificités des uns et des autres, les militants issus de l’immigration coloniale, des actuelles colonies ou vivant dans les quartiers populaires, pourront agir ensemble et déterminer en toute autonomie leur pensée, leur programme et leur stratégie politique.
Le PIR sera un parti de résistance quotidienne, un parti de mobilisation populaire, un parti de rassemblement, un parti qui agira à l’échelle nationale et à tous les niveaux de la lutte politique, un parti qui ne fera aucune concession sur ses objectifs fondamentaux que sont l’antiracisme, l’antiimpérialisme, l’anticolonialisme et l’antisionisme. Il n’y a pas d’autres voies pour la libération des peuples !
Le PIR sera un parti de lutte contre la suprématie blanche et pour l’avènement, en France comme dans le reste du monde, d’une société assurant l’épanouissement de tous dans l’égalité, la justice et la dignité des individus, des communautés et des peuples.
Dans cette perspective, le PIR agira en France pour l’émergence d’une nouvelle majorité politique, capable de contrôler les principaux leviers institutionnels et déterminée à engager les profondes réformes institutionnelles, sociales, économiques et culturelles, nécessaires pour mener à bien le processus décolonial, dans ses différentes dimensions, et combattre les inégalités raciales.
Tout en participant au développement et à l’organisation des luttes, en particulier à l’échelle des quartiers populaires où sont concentrées les populations traitées comme des indigènes, le PIR agira pour être présent lors des échéances électorales de 2012 à 2014, et notamment aux élections présidentielles, législatives et municipales, de manière à construire l’autonomie politique indigène et à renforcer la dynamique décoloniale.
Sur le plan organisationnel, le PIR articulera en son sein deux niveaux d’organisation et de représentation interne : 1) le PIR est un parti composé d’individus unis par de mêmes objectifs politiques fondamentaux, indépendamment de leurs origines, de leurs croyances religieuses, de l’inspiration spirituelle qui est la leur, de leurs coutumes, ou de leurs options philosophiques ; 2) le PIR reconnaît en son sein l’existence de communautés organisées, constituées sur la base du volontariat autour des identités historiques et/ou culturelles infériorisées dans le cadre du processus colonial. Ces communautés culturelles participeront aux mécanismes d’élaboration et de définition politique du PIR et disposeront de possibilité d’expressions publiques.
Ces principes et ses orientations politiques et organisationnelles ont été établis et développés par notre premier Congrès dans plusieurs documents fondateurs adoptés par les congressistes au cours de deux journées de débats intenses.
Il s’agit de :
1) Principes politiques généraux du PIR
2) Statuts du PIR
3) Résolution sur l’orientation politique du PIR pour la période à venir
4) Déclaration sur l’islamophobie
5) Déclaration sur les réparations relatives à la traite négrière transatlantique et à la réduction en esclavage des Africains
6) Motion sur la négrophobie
7) Motion sur la solidarité avec le peuple palestinien, victime de la barbarie coloniale sioniste
D’autres documents ont été l’objet de discussion, traitant des « statistiques ethno-raciales », de la question culturelle, des réformes à engager au niveau des régions.
La plupart de ces documents seront rendus publics sous peu.
Par ailleurs, le Congrès a élu une direction politique et désigné 4 porte-parole : Houria Bouteldja, Joby Valente, Bidzanga Nana et Mbaireh Lisette.
Beaucoup reste encore à faire. Le Congrès constitutif du PIR a représenté un premier pas. Nous appelons tous ceux qui veulent s’engager contre les formes contemporaines du colonialisme et du racisme, contre l’oppression subie par les populations des quartiers populaires et les inégalités, à nous rejoindre dans notre combat.
Le Parti des Indigènes de la République
Paris, le 28 février 2010