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Quand les islamophobes dénoncent le « prosélytisme musulman», ils ne parlent pas tant de prosélytisme religieux que d’incitation à l’occupation indigène de l’espace public. Quand ils interdisent le voile à l’école, ils interdisent l’accès de l’espace public aux indigènes qui rechignent à être « beurisés ». Quand ils assurent défendre l’émancipation des femmes musulmanes tout en respectant leur foi, c’est encore un leurre: ils veulent, en fait, interdire aux femmes leur émancipation en tant qu’indigènes. Les musulmans (et plus largement les indigènes) ne sont les bienvenus dans l’espace public qu’à la stricte condition qu’ils s’en prennent à d’autres musulmans, c’est-à-dire qu’ils se battent contre eux-mêmes. La République est une religion islamophobe.
L’islamophobie ne combat pas le musulman en tant que musulman mais le musulman en tant que rebelle potentiel à l’ordre blanc – et c’est pourquoi tout musulman est un intégriste ou un terroriste en puissance. Elle ne se développe pas principalement dans le champ de l’intolérance religieuse mais dans celui de la lutte raciale. Elle ne constitue donc qu’un volet de cette contre-offensive coloniale qui est menée contre l’ensemble des indigènes et, plus particulièrement, contre l’espace privilégié de leurs résistances, les cités populaires où se nouent les différentes facettes de la politique sécuritaire.
Sadri Khiari
extrait du livre « La contre-révolution coloniale en France, de de Gaulle à Sarkozy » édition La Fabrique