Bessonnerie

Il faut une véritable alternative à la politique raciste de l’ « identité nationale »

Eric Besson, le ministre de l’immigration et de l’identité nationale vient de relancer la campagne raciste sur l’identité nationale qui avait joué un rôle majeur dans la victoire de Sarkozy aux dernières élections présidentielles. Les arrières-pensées électoralistes de cette nouvelle campagne sont évidentes à la veille des élections régionales. Très probablement, il s’agit également d’une stratégie de diversion alors que les mouvements de mécontentement social se généralisent dans un contexte de croissance du chômage, de la précarité et de dégradation du pouvoir d’achat. On peut supposer aussi qu’elle vise à enterrer médiatiquement la polémique suscitée par la discrimination très positive dont a bénéficié Jean Sarkozy.

Mais, qu’elles que puissent être les motivations immédiates de ces basses manœuvres politiciennes, cette dernière bessonnerie est révélatrice de la pensée profonde de ceux qui nous gouvernent et, par delà les discours sur la promotion des « élites » de la « diversité » ou, plutôt, en harmonie avec eux, elle confirme le choix stratégique de consolider le pilier blanc-européen-chrétien du « pacte républicain » dans le cadre du nouvel espace impérial européen en construction. Ne nous y trompons pas : cette orientation est loin d’être l’exclusivité de l’UMP. Comme le montre l’affaire de la burka, initiée par le communiste André Gérin avec le soutien de la plupart des forces politiques, et reprise aujourd’hui par Besson, il y a longtemps que la défense de « l’identité nationale » contre les cultures portées par les minorités originaires des anciennes colonies est un thème largement partagé à droite comme à gauche. Il est, de ce fait, parfaitement vain et bien souvent hypocrite de prétendre s’opposer à la politique raciste du gouvernement en l’accusant d’aller chasser sur les terres du Front national.

La seule riposte efficace dans la durée impose de déblayer le terrain à une véritable alternative multiculturelle et décoloniale. Il s’agit de mettre en place des dispositifs permettant la promotion des cultures populaires écrasées par deux siècles de centralisme parisien uniformisateur et par la mondialisation libérale, de reconnaître et d’encourager le développement des cultures portées par les populations issues de l’immigration coloniale, de favoriser enfin des échanges interculturels égalitaires. Le multiculturalisme ne peut être une simple profession de foi ou la promotion d’un folklore dont les couleurs se perdraient dans les plis du drapeau français. Il exige une refonte du modèle instauré par la République, l’inscription institutionnelle des droits collectifs des minorités culturelles, linguistiques et nationales, anciennes et nouvelles, dans les domaines qui les concernent particulièrement et dans le respect des libertés individuelles. Le multiculturalisme et l’interculturalisme, comme nouveaux fondements de l’ « identité nationale », nécessitent une pratique ouverte et égalitaire d’une laïcité, marquée aujourd’hui à la fois par son sectarisme vis-à-vis des cultes et par l’empreinte chrétienne qui, paradoxalement, la caractérise. Une autre laïcité devra préserver la séparation de l’Etat et des religions mais considérer les spiritualités, chrétiennes, musulmanes, juives comme les religions dites traditionnelles d’origine africaine, antillaise ou d’ailleurs, comme autant de besoins sociaux et comme des composantes à part entière de l’identité de ce pays. Le multiculturalisme et l’interculturalisme réellement assumés ont également comme impératif une réforme des programmes de l’enseignement destinée à battre en brèche le national-chauvinisme et le suprématisme blanc qui les caractérisent actuellement.

Telles sont, rapidement ébauchées, les principales lignes directrices de la réforme politico-culturelle qui doit refonder l’identité populaire dans le respect des identités de tous et de leur égale dignité. C’est à ces questions que devrait réfléchir une opposition véritablement antiraciste qui verrait plus loin que le bout de son nez, lequel, hélas, s’allonge ou rétrécit en proportion exacte de la durée des mandats électoraux.

Le Secrétariat exécutif du MIR
Le 27 octobre 2009

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