A vous de conclure

Aïcha et Amin sont dans un bâteau

Le 15 août dernier, Aïcha Mokhtar, une Marocaine âgée 62 ans résidant à Oujda – atteinte d’une forme rare d’un cancer des os – meurt faute d’avoir obtenu un visa pour se faire soigner en France. Au même moment, sur le site officiel de l’administration du tourisme au Maroc, on se flatte en toute indécence d’avoir accueilli plus de 5 millions de visiteurs – dont probablement beaucoup de Français n’ayant, quant à eux, rencontré aucune difficulté pour obtenir leur visa – vital pour des vacances réussies. Il est ainsi plus facile, pour une citoyenne française, de s’offrir une chirurgie plastique dans l’une des nombreuses cliniques du royaume que pour une citoyenne marocaine, frappée par la maladie, de recevoir les soins de l’hôpital Gustave Roussy à Villejuif.

Côté patrie-des-droits-de-l’homme-universelle-républicaine-féministe, on se justifie comme on peut d’avoir refusé à cette femme l’accès aux soins médicaux. Et quand le frère de Aïcha, après avoir sollicité Amara et Hortefeux, frappe en désespoir de cause, à la porte du Président de la République – expert en sauvetage d’infirmières bulgares – il reçoit cette réponse : « Je dois vous indiquer qu’il ne m’est pas possible de répondre à votre attente dès lors que les services compétents, auxquels la présidence de la République ne peut se substituer, se sont déjà prononcés ».

Ni la saison, ni le pays d’origine, ni même l’ethnicité ou la religion de la victime ne se prêtent à une spectaculaire opération commando sac de riz: alors pourquoi diable le président en talonnettes ou l’un de ses ministres se risqueraient-ils à une entreprise si peu rentable médiatiquement?

Aussi n’ont-ils rien fait.
Le chroniqueur Khalid Jemaï a écrit une lettre ouverte à l’ambassadeur, reproduite sur le site de Bakchich – seule plateforme d’information à avoir suivi l’affaire en France. Extraits d’un article d’Emile Borne, publié le 26 août:

« Sous le titre « L’ignominie », Jamaï rappelle d’abord que le refus du consulat de Fès fut motivé par une erreur due à une homonymie malencontreuse. « L’erreur était flagrante, écrit-il, mais rien ne put venir à bout de l’arrogance, du mépris et de la suffisance des autorités françaises ».
(…)
Pour Khalid Jamaï, « la mort de cette femme relève, à bien des égards, de la non assistance à personne en danger, car vous saviez, monsieur l’ambassadeur, et vos services aussi, que Aïcha se mourrait, se consumait. Ce refus inhumain fut une condamnation à mort qui ne devait connaître son terme fatal qu’après une agonie de plusieurs mois. « Face à celle-ci, votre attitude ne changea pas d’un iota, drapés que vous étiez dans vos certitudes.

« Croyez-vous, sincèrement, monsieur l’ambassadeur, que dans l’état où elle se trouvait, elle constituait un quelconque danger pour la sécurité de votre pays ou qu’elle cherchait à s’y installer ? « Comment expliquer cette attitude condamnable à tous égards, sinon par le mépris, à tous les échelons, de votre administration pour la vie d’une « indigène » dont la mort n’intéresse et ne troublera personne et qui ne pourra faire la une de vos journaux télévisés. « Ayez la conscience tranquille, monsieur l’ambassadeur, il ne s’agit que d’une dénommée Aïcha Mokhtari qui, pour nos gouvernants, n’était qu’une « Bouzabelle (qui fouille les poubelles) », une « khorotovski (une bouseuse ) » Elle n’était pas de la famille de cet ancien conseiller du roi qui a fauché une policière, impunément. Elle n’était pas la tante du Roi qui a tailladé, en public, le visage d’une avocate, en toute impunité. Elle n’était pas l’enfant de ce gouverneur, qui, ivre mort, pendant le mois de ramadan, a causé un accident mortel et qui a été relaxé car jugé « déséquilibré ». Elle n’était pas une autre tante du souverain dont le mari a tiré sur un policier qui voulait accomplir son devoir. « Déséquilibré » lui aussi… Elle n’était qu’une Marocaine lambda !

Je suis heureux, monsieur l’ambassadeur, que l’on n’ait pas à vous demander un permis d’inhumer, car je suis certain que vos subordonnés auraient trouvé qu’il manquait quelques pièces. Si vous avez agi avec tant de désinvolture, c’est parce que vous y avez été encouragé par l’inaction des responsables et des gouvernants marocains, par leur laxisme, par leur mépris pour leurs compatriotes. Aïcha n’était qu’un sujet parmi des millions d’autres, mais pas une citoyenne. La citoyenneté implique en effet des devoirs pour l’Etat et le rend comptable de ses actes. »

En voyant Amin, le militant UMP d’origine arabe ridiculisé par les tapes sur la joue et les propos racistes du ministre Brice Hortefeux, on pense forcément à l’histoire de Aïcha – chacune de ces histoires (malheureusement vraies) se reflétant sur l’autre, comme dans une sorte de prisme monstrueux aux multiples facettes.

Au fond, « l’immigration choisie » pourrait se définir selon les termes de la devinette qui suit: Aïcha et Amin sont dans un bâteau. Aïcha tombe à l’eau. Qu’est-ce qu’il reste?
Le PIR.

Princesse de Clèves

SOURCE : Islamogauchiste

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