Soutien à Houria Bouteldja

Elisabeth, ses potes et délateurs.blabla…

Un papier très curieux – « Touchez pas à mon pote ! Mouloud Akkouche cible des Indigents de la République » – sur un site encore plus curieux – « Causeur.blabla » – vient dernièrement nous rappeler toute la densité du « je-ne-sais-quoi et presque-rien » du baroque très à la mode actuellement.

Ecrit par un faiseur de romans policiers à qui on ne l’a fait pas – il fréquente les « salons polardeux », « boit des coups » et trouve « Drieu aussi intéressant que Vaillant et Aragon » -, ce papier part en guerre contre Houria Bouteldja – porte-parole des Indigènes de la République – au nom des « derniers des Yougoslaves », pas moins. Sans partager toutes les fulgurances des Indigènes, j’en reconnais l’utilité salutaire qui, souvent, réveille les bien-pensants de leur sommeil dogmatique. Les indignations des Indigènes, sinon leur seule existence dérange évidemment les petits gardiens de l’anti-conformisme comme il faut, même s’ils ont recours à Bernanos ou Pasolini.

Au delà ou en-deçà de ce tic BHèlien de la citation sans contenu ni tête, faudrait-il encore pouvoir argumenter sur un fond quelconque… En l’occurrence, la charge menée par notre écrivain « polardeu » qui, par ailleurs se dit aussi « Hussard de la gauche » – diantre ! – aurait pu être héroïque, voire glorieuse si elle avait seulement mis en mouvement quelque concept, l’amorce d’un bout de pensée ou, à minima, un peu de contenu visant la recherche d’une vérité politique. Fabrice de Dongo était à Waterloo, mais il n’a vu que de la fumée et des chevaux… Quand je parle de vérité politique ou du sens de la bataille, il ne s’agit pas en effet d’un jugement personnel mais d’un processus : une vérité politique ce n’est pas « je dis que j’ai raison et que l’autre à tort », ou « j’ai raison d’aimer ce pote et de détester cette porte-parole ». Une vérité politique, comme dit Alain Badiou est quelque chose qui existe dans son processus actif et qui se manifeste, en tant que vérité, dans les différentes circonstances traversées par ce processus » ([Alain Badiou : Le réveil de l’histoire. Nouvelles éditions Lignes, 2011.)].

Malheureusement – ici – rien de tel. Tout au contraire, on reste dans le pathos tellement symptomatique de cette idéologie du dégluti des petits chiens de garde qui consiste à opiner du chef en faisant appel « aux potes ». Pas le moindre essai de lutte du vrai contre le faux, mais un chapelet de jugements moraux et crapoteux très conformes aux poutres du site Causeur.blabla dont Elisabeth est l’une des commissaires : l’information, les idées et la culture survolées par des donneurs de leçons morales : on aime, on n’aime pas, ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous, le bien contre le mal, la civilisation contre la barbarie, etc, etc… Elisabeth et ses potes de Causeur.blabla n’apportent aucune information originale mais s’approprie un réel dont ils prétendent nous dire ce qui est bon et mauvais, dénonçant au passage les mal-pensants à mettre au pilori. Bref, une cuisine quelque peu ragoûtante qui n’a même pas l’excuse des bonnes vieilles recettes pamphlétaires. Quelle mauvais goût !

Dans cette logique, on l’a compris les Indigènes de la République c’est mal, comme la gauche « de Staline à Hessel », titre de l’une des rubriques de ce drôle de site. A ce sujet, on a pu voir, un soir sur une chaine de télévision du service public, la même Elisabeth déraper grave. Toujours fidèle à la recette de Causeur.blabla : je juge donc je suis, je dénonce donc j’existe ! Encouragée par l’animateur du Point, Bernard-Henri Giesbert, elle s’auto-hystérise contre l’auteur d’ « Indignez-vous » en lançant : « j’aurai préféré que Stéphane Hessel ait une vie de merde… » (SIC) Et ce bouffon de Giesbert de la titiller en semblant s’indigner lui-même : « mais Elisabeth, la Rééésistaaance, la Rééésistaaance… » Evidemment, dans ces conditions l’autre ne pouvait qu’en rajouter des tonnes. Spectacle affligeant que ce nouveau « journalisme » des potes qui sont partout et de ceux qui ne sont pas des potes donc des salauds. Pourquoi tant de haine ? Simple : en fait, ce qui insupporte Elisabeth et ses potes, c’est que, légitimé par une vie au service de la résistance, des Nations unies et des sans-papiers, Stéphane Hessel ose critiquer la politique d’Israël à Gaza, dans les territoires, les colonies et ailleurs. Et cela, les petits commissaires de la doxa dominante ne peuvent le supporter sans le dénoncer, leur gagne-pain en dépend.

En conséquence, Elisabeth, continuez avec vos potes à éructer en rond sur votre site Délateur.blabla. Avec les toutous gardiens de la Weltanschauung américano-israélienne, continuez à opiner du chef, en distribuant vos bons et mauvais points, vos AAA faussement anti-conformistes. Poursuivez le seul soliloque dont vous soyez réellement capable : blablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablablabla…

Richard Labévière

Ethnologue

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