Deux camps semblent s’opposer, ceux des nationalistes vieille France, qualifiés par certains de pétanistes, pour leur référence à la terre, essence supposée de la France, ou plus généralement de la souchitude comme fondement de la Nation française et les Républicains qui pensent que l’identité nationale doit se fonder sur des valeurs. Les premiers sont immédiatement reconnus comme extrêmistes, antipathiques, voire même fascistes ou racistes. Les seconds, en revanche, font l’objet d’un consensus bien plus large. A gauche, ce camp républicain est le mieux représentée par la penseuse féministe, dont la notoriété s’est faite en sabrant1 Tariq Ramadan dans un opuscule éradicateur2 intitulé « Frère Tariq« , j’ai nommé Caroline Fourest3. Son premier livre, « Face au boycott» , lui aura probablement enseigné que pour faire sortir le laborieux combat féministe de la marginalité, le plus simple était encore de s’enrôler dans le clash de civilisation en professant un féminisme colonial islamophobe de bon teint. Ses engagements contre le voile islamique et sa dénonciation des barbus-véliques4 et autres islamogauchistes5 lui ont permis de remporter le Prix national de la laïcité ainsi que le prix du livre politique de l’Assemblée nationale6. Sa thèse, et celles des nationaux-républicains de gauche, comme de droite, simple et modérée en apparence, consiste à proposer de remplacer une identité nationale fondée sur l’identité raciale De Souche par une identité nationale fondée sur les valeurs républicaines. Bref, de façon quelque peu paradoxale, elle propose une identité nationale, particulière à la France donc, qui soit universelle7.
Le principe du besoin d’une identité pour la Nation et définissant ce qu’est un bon français est bel et bien confirmé. Il y a les bons français, ceux qui adhèrent aux valeurs prédéterminées, et les faux ceux qui sont soupçonnés d’y déroger. Eric Besson définit ces valeurs par le classique tryptique « liberté, égalité, fraternité» , dont l’application se fait toujours attendre, tout en y ajoutant « laïcité, égalité hommes femmes» qu’il faudrait défendre, mais contre qui ?8 Le traitement égalitaire des femmes fondant, rappelons-le dans l’imaginaire colonial, la différence entre la civilisation républicaine et la barbarie indigène.9
Je vous propose pour illustrer ce débat, une publicité de la rillette Bordeau Chesnel. Dans cette publicité, à une réception de mariage (une micro-société en somme), nous y voyons deux jeunes et belles femmes d’un statut social élevé refuser les avances de deux monsieurs parce qu’elles n’auraient pas les mêmes valeurs. Avant de s’en aller, elles leur proposent, dans un geste mi amusé mi condescendant, des rillettes Bordeau Chesnel afin de leur permettre d’accéder à ces fameuses valeurs. Déçus, ils décident tout de même de gouter à ces rillettes, probablement afin d’accéder à ces fameuses valeurs dans l’espoir d’être digne aux yeux de ces distinguées demoiselles. Deux autres demoiselles, séduites par les monsieurs, leur demandent de les accompagner pour une promenade dans le parc. Manque de chance, elles ne sont pas vraiment attirantes, même si rien d’indique un statut social inférieur à ces messieurs. Ne sachant comment légitimer leur refus de les accompagner, l’un des monsieurs prétexte la différence de valeurs en leur proposant à son tour les rillettes Bordeau Chesnel puis s’en vont à leur tour. Le spot se conclue par le slogan « Rillettes Bordeau Chesnel, Nous n’avons pas les mêmes valeurs » , juxtaposant pour mieux les lier une pratique culturelle, celle de manger des rillettes de Porc, et l’appartenance à une communauté de valeurs. Remarquez que le groupe des deux monsieurs, même s’ils mangent les rillettes pour acquérir ces valeurs, n’atteignent pas le niveau de distinction et de beauté des deux premières demoiselles et n’arriveront pas à leurs fins.