Cette violente charge contre le PIR, mais aussi contre les Y’a bon Awards, vise clairement à liquider les rares espaces politiques de l’immigration dont on sait qu’ils ne plieront pas devant l’injonction à « l’union nationale » et dont le combat contre l’islamophobie, avec une grande partie des forces antiracistes, commence à porter ses fruits tant sur le plan national qu’international. L’amalgame aussi stupide qu’honteux de Christophe Ramaux dans les colonnes du Monde est, du point de vue de cette stratégie, extrêmement transparent. De manière navrante, il déclare : « Comment expliquer que des dirigeants d’Attac, du NPA, des journalistes de Politis et d’autres – les uns et autres ont organisé avec les Indigènes de la République et Mediapart une Journée contre l’islamophobie le 13 décembre 2014 – aient pu alimenter cette infamie ? Comment expliquer que certains animateurs des Économistes atterrés aient rejeté la collaboration de Charb au prétexte qu’il était islamophobe ? »
À la manière d’un Ivan Rioufol qui « somme », à l’antenne de RTL, Rokhaya Diallo de « se désolidariser » publiquement de cet attentat parce qu’elle est musulmane, nous sommes soumis en permanence à l’injonction raciste de prouver la clarté de nos positions. Pourtant, comme la plupart des organisations musulmanes, nous avons condamné avec la plus grande fermeté la fusillade meurtrière contre Charlie Hebdo, tout comme nous déplorons les cinq autres nouvelles victimes de cette folie aveugle. De plus, leurs auteurs ont agi clairement contre les intérêts des musulmans et des habitants des quartiers.
Les déclarations de Mme Bougrab ne sont pas improvisées et répondent à l’attente de ceux qui, loin d’avoir médité la tragédie de Charlie Hebdo, loin de rechercher des solutions politiques, sont ceux-là même qui ont dressé le décor dans lequel celle-ci s’est déroulée. Au fond d’eux-mêmes, ils ont bien conscience de cette vérité : ce sont eux qui, par leurs outrances et leurs encouragements à l’islamophobie, ont alimenté ce climat malsain depuis de nombreuses années, pendant qu’à l’inverse, nous ne cessions, nous, d’alerter contre ce genre d’issues fatales. En nous pointant du doigt ainsi, ils espèrent détourner le regard de leurs propres responsabilités ou de leur complicité passive. En d’autres termes, ils frappent par anticipation, pour ne pas avoir à rendre des comptes sur les lourdes conséquences d’une politique à laquelle ils ont largement participé.
Ainsi, nous affirmons que la lutte contre l’islamophobie et le racisme d’État n’a non seulement aucunement à pâtir de cet événement mais qu’au contraire elle s’en trouve renforcée.
Est-il nécessaire de rappeler que des dizaines de mosquées sont profanées chaque année à travers le pays depuis des années ? Est-il nécessaire de rappeler que des dizaines de musulmans et surtout de musulmanes, coupables simplement d’être eux-mêmes, sont jour après jour frappés non seulement dans leurs biens mais aussi dans leur chair ? Insultés, menacés, agressés physiquement, voire tués comme ce fut le cas avec la jeune Maroua en Allemagne, mais aussi en France à Argenteuil, quand, il y a deux ans, frappée par des skinheads, une jeune musulmane enceinte a perdu son enfant ? Est-il nécessaire de rappeler que partout en Europe des groupes néo-nazis se mobilisent massivement contre les musulmans et qu’ils représentent aujourd’hui une menace politique de sinistre mémoire ? Enfin, faut-il rappeler que des musulmans et de nombreux lieux de culte ont été la cible d’actes criminels en réaction à l’attentat contre Charlie Hebdo ?
En tout état de cause et pour ce qui nous concerne, la lutte contre le racisme d’État, l’impérialisme et le sionisme demeurent notre priorité. Et ni Bougrab, ni Fourest, ni Le Pen, ni Sarkozy, ni Hollande, qui trouvent là l’occasion de s’acheter une conscience à bon compte en communiant dans cette nouvelle « Union sacrée » occidentale – les grands dirigeants de l’Europe impérialiste, ont déclaré leur participation – ne nous ferons dévier de cette voie.
Nous devons affronter les retombées en Europe des menées impérialistes dans le monde et au Moyen-Orient en particulier, du racisme et de la relégation sociale. Nous devons impérativement rompre avec les solutions dépolitisantes et moralisantes qui font abstraction des conditions politiques et sociales qui engendrent et alimentent sans cesse ces violences. C’est l’occasion de faire le procès d’un système qui ne sait que produire de l’horreur.
Nous avons l’honneur d’être de la lignée des Frantz Fanon, Aimé Césaire, René Vautier, Angela Davis, Abdelkrim El Khattabi, Lalla Fatma N’Soumer… qui ont toujours su prendre leurs responsabilités quand soufflent les vents mauvais. Nous sommes de la lignée de ceux qui ne cèdent pas plus devant la menace que devant l’humanisme bêlant. Ce que les nouveaux papes de l’union nationale tentent de faire, c’est de réduire à néant la possibilité d’une solution politique et de poursuivre « cette guerre déclarée » qu’ils font mine de dénoncer.
Pour notre part, nous ne participerons pas à la manifestation de dimanche 11 janvier car nous ne répondons à aucune convocation et ne marchons pas derrière les agents de la contre-révolution coloniale, fauteurs de désordre social et politique parmi lesquels la chancelière allemande, Angela Merkel, le président ukrainien, Petro Porochenko, ami des néo-nazis de son pays, le criminel Netanyahou, représentant de l’État sioniste et … Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN. Nous avons à la fois l’esprit suffisamment lucide pour éviter le mirage du « tous ensemble » émotionnel, de la régression politique qu’il va engendrer et qui menace nos résistances et l’ensemble du champ politique et aussi le cœur suffisamment gros pour participer à un front, le plus large possible, avec toutes les forces qui seront sans complaisance avec les assassins et qui poursuivront la lutte contre le racisme, l’impérialisme et pour la justice. Les forces qui ne se soumettront jamais à l’agenda des États qui veulent dominer la planète. Créons du politique, créons de l’espoir collectif !
Paris, le 10 janvier 2015
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