Trois enseignements de la séquence négrophobe actuelle

La nouvelle séquence négrophobe ouverte à Saint-Etienne et à Cergy devrait servir de leçon à tous les militants sincères engagés contre le racisme structurel et le racisme d’Etat. Son premier enseignement est qu’aucune actualité politique ne saurait abolir celle de la négrophobie. Le PIR salue les mobilisations qui ont fait suite à ces actes, et appelle à ce que Justice soit rendue à toutes les victimes du racisme négrophobe, en soulignant qu’elle ne saurait être rendue par un Etat raciste et une classe politique participant quotidiennement de notre oppression.

Le deuxième enseignement de cette séquence pour notre espace politique est que ces actes dépassent la simple question de la responsabilité individuelle. Que les auteurs des attaques négrophobes s’excusent ne constitue pas une solution en soi, car l’individualisation de ces actes participe au déni collectif, forme la plus élémentaire de résistance à la lutte antiraciste que tout militant non blanc s’en revendiquant devrait savoir identifier, car il y fait face dans sa lutte quotidienne face à la communauté blanche dominante. La Justice ne saurait être rendue par de simples condamnations morales, des indignations légitimes, des #notinmyname coupables ou par une délégation de la lutte contre la négrophobie aux seules organisations noires. Ces formes de réponse relèvent d’un antiracisme moral participant du déni d’un phénomène bien plus global et structurel, qui ne concerne pas que les sociétés du Nord. C’est ce déni qui produit chaque jour de nouveaux partenaires, conscients ou inconscients, de la suprématie blanche et du racisme anti-noir. La lutte contre ce déni implique bien sûr de l’éducation, sur l’histoire des relations interraciales et de l’esclavagisme au sein de nos sociétés d’origine, mais surtout une conscience aiguë et honnête des rapports de pouvoir qui se jouent au quotidien, et une action réelle, en particulier au sein de nos propres mouvements.

Car le troisième enseignement de la séquence négrophobe actuelle est celui-ci : il est du devoir de tout militant antiraciste d’observer objectivement ses propres réactions face à la question noire. Lorsque son premier réflexe face à la dénonciation d’une oppression raciale est de s’alarmer de la perspective apocalyptique d’une « guerre raciale », il adopte une réaction symétrique à la réaction blanche, en participant à la reproduction des structures qui maintiennent nos soeurs et frères noirs dans une zone de non-être social et politique, y compris au sein du mouvement décolonial. Le racisme est un rapport de pouvoir. La question noire agit comme un révélateur de la structure des rapports de race au sein de notre société, et elle les clarifie.

La lutte contre la négrophobie au sein de nos communautés ne constitue en aucun cas un aveu de faiblesse ou de fragilité, comme le décrivent les défenseurs de cet ordre social de plus en plus dénudé et violent. Au contraire, elle constitue la voie vers la reconquête de notre Dignité collective.

PIR

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