Chibanis

Pour le droit à vivre dignement ici et là‐bas,

Introduction
La situation des vieux immigrés en France et notamment des vieux immigrés maghrébins est devenue depuis peu un sujet de préoccupation, alors que pendant des années, cette problématique était quasiment absente du débat public. Aujourd’hui, militants associatifs, professionnels de santé, travailleurs sociaux, chercheurs, tous constatent la dégradation des conditions de la vie des vieux retraités immigrés vivant en France :

1. Au niveau de leur état de santé, on constate qu’alors qu’ils consultent trois fois moins que les Français âgés, les vieux travailleurs maghrébins souffrent, dès 55 ans, de pathologies observées chez les Français de vingt ans plus âgés, selon le HCI (Rapport sur « la condition sociale des travailleurs immigrés âgés », mars 2005). Elles sont liées aux conditions de travail pénibles sur les chantiers, au logement précaire, indigne et insalubre, aux carences alimentaires, à des affections respiratoires, au diabète…

2. Au niveau des conditions de logement, les foyers ADOMA (ex Sonacotra) présentent un état de vétusté avancé et restent inadaptés à l’accueil de population vieillissante. Les espaces réduits et exigus (8 à 12m2) des chambres ne permettent pas de vivre dans des conditions sanitaires normales avec l’avancée en âge. Les foyers restent des espaces fermés à l’extérieur, dans lesquels les problématiques que rencontrent les personnes s’inscrivent dans l’invisibilité la plus totale jusqu’au scandale (des morts sont découverts des jours après par les résidents eux-mêmes).

Les processus de vieillissement des travailleurs migrants en foyer apparaissent comme étant difficilement appréhendables par les gestionnaires et les travailleurs sociaux : séjours prolongés, allers-retours continus, isolement familial et état de santé aggravé, logement inadapté à la perte d’autonomie font que ces résidents rencontrent des difficultés pour accéder aux prestations sociales et aux soins.

3. Au niveau administratif : ces personnes sont confrontées depuis des années à une administration qui ne leur reconnait pas le droit d’aller et venir librement, les soumettant à vivre sous « liberté conditionnelle » entre ici et là-bas. Il s’agit d’une véritable assignation à résidence pour ces personnes, qui sont dans l’obligation de respecter des quotas de temps de résidence pour le maintien de leurs acquis sociaux pour lesquels ils ont cotisé toute une vie.

Nous constatons la multiplication des contrôles des prestataires sociaux (CAF, MSA, CRAM…) dirigés à l’encontre des Chibanis. Ces contrôles ont pour objectif de vérifier si ces quotas de temps de présence en France sont remplis, et de couper les prestations à celles et ceux qui auraient eu le malheur de prolonger un peu trop leur séjour dans le pays d’origine, aggravant dès lors leur situation de précarité… Pire, aujourd’hui, des dispositifs spécifiques aux vieux migrants présentés comme des aménagements en leur faveur sont en réalité de véritables pièges tendus, ayant pour objectif de les encourager à partir avec souvent des conséquences désastreuses sur leurs acquis sociaux.

La carte de séjour mention « retraité » est emblématique de cet état de fait : Cette carte est réservée uniquement aux (anciens) titulaires d’une carte de résident (10 ans) et à leur conjoint s’il a résidé en France. Mais un « vieux migrant » a vraiment beaucoup à perdre lorsqu’il échange sa carte de résident contre une carte retraité, car il perd les droits associés avec le statut de résident. A commencer par l’essentiel des droits à l’assurance maladie, et ce alors même que des cotisations continuent à être prélevées sur sa retraite….

Il est temps de réagir à cette situation. Nous proposons de réunir au sein d’un collectif les acteurs qu’ils soient militants associatifs, ou professionnels de santé ou du social et de lancer une campagne nationale d’information. Cette campagne aurait pour objectif de sensibiliser le public à la situation des Chibanis, de faire entendre un certain nombre de revendications, de créer un rapport de force politique sur ces questions, et de créer des outils d’information en direction des Chibanis et des professionnels qui les côtoient.

La Case de Santé et le CIRRVI (Centre d’Initiatives et de Ressources Régionales autour du Vieillissement des populations Immigrées) sont à l’initiative de ce projet. Le Tactikollectif nous offre la possibilité de lancer cette campagne lors d’une soirée consacrée à ce thème dans le cadre du festival « Origines Contrôlées » qui se déroulera le 26 novembre 2009.

Nous vous proposons de nous rencontrer pour une réunion de travail le 3 ou le 10 octobre (selon les convenances) à Toulouse. D’ici-là, nous proposons la création d’une liste de discussion internet pour pouvoir échanger sur ce projet, le préciser et débattre. Si vous souhaitez participer à la construction de ce projet et rejoindre ce collectif écrivez à jeroh@casedesante.org pour demander votre inscription à la liste de discussion.

Contacts : jeroh@casedesante.org ou kadija.rafai1@orange.fr

SOURCE : LMSI

Ce contenu a été publié dans Actualités. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.