A travers une série de tribunes et d’articles, plus ineptes les uns que les autres, Le Monde, Le Figaro ou Marianne dépeignent la porte-parole du Parti des Indigènes de la République en « raciste », « homophobe » et « antisémite ». Imbus de leur position et de leur impunité, les procureurs médiatiques n’apportent bien sûr aucune preuve à ce qu’ils avancent. A coups de déformations, d’interprétations fallacieuses et d’accusations infondées sur le contenu du livre d’Houria Bouteldja (1), ces défenseurs zélés d’un système, qui maintient et pratique un racisme structurel à tous les étages de la stratification sociale, cherchent à hystériser le débat en vue d’un procès en sorcellerie de la récalcitrante.
En Belgique comme en France, cette stratégie éculée consiste à opposer un antiracisme dit «universaliste » et « humaniste » à celui du PIR et des militants de l’antiracisme politique. Ces derniers sont ensuite accusés, au mieux, de dérive identitaire, au pire, de constituer le pendant racisé du racisme de l’extrême-droite. Tartuferies qui ne tiennent pas la route. En réalité, ce que ces idéologues paternalistes ne pardonnent pas aux activistes de l’antiracisme politique, c’est de disperser le brouillard cotonneux de l’antiracisme à la sauce SOS Racisme ou UNIA, de mettre le doigt là où ça fait mal, c’est-à-dire à peu près partout. Ce qu’ils leur reprochent encore, c’est de mettre en évidence l’enracinement profond d’un racisme structurel au sein de toutes les institutions et dispositifs des sociétés française et belge. Ce qu’ils leur reprochent, enfin et surtout, c’est d’objectiver la permanence de cette hiérarchisation raciale et d’en faire un rapport de lutte à part entière.
Les acteurs de cette campagne médiatique et les centres de pouvoir s’inquiètent de la progression d’une vision alternative de la société. A savoir, une vision décoloniale liée à la présence aujourd’hui indocile et revendicative, politiquement critique, de citoyens non-blancs au sein de nombreux espaces sociaux ainsi que dans les paysages électoral et politique. Une vision qui passe notamment par la détermination de faire sauter le déni du passif colonial, un tabou encore plus féroce en Belgique qu’en France…
L’expression grandissante des populations issues de l’immigration postcoloniale, l’organisation et l’articulation de leurs luttes ainsi que leur poids électoral lorsque leurs voix se portent sur des candidats des quartiers populaires font trembler ces politiciens, éditorialistes et intellectuels du sérail ethno-nationaliste hégémonique et déstabilisent la pérennité de leur domination.
C’est parce qu’Houria Bouteldja refuse leur injonction au silence et à la discrétion qu’elle est victime de ces tentatives visant à la décrédibiliser et à l’éliminer du débat public. C’est également parce qu’elle a été récemment soutenue par une vingtaine d’intellectuels français blancs que ses détracteurs fulminent et tentent, chaque jour davantage, de la diaboliser.
Aujourd’hui, c’est elle, en France. Demain, qui, chez nous ?
En conséquence, il nous apparaît impératif de s’unir contre ces attaques malhonnêtes et calomnieuses. En les dénonçant pour ce qu’elles sont : le ressac permanent d’une vague ultraréactionnaire qui – sous un antiracisme d’apparat et avec une vision hégémoniste de l’élément « populaire » – défend ses privilèges de race et de classe. Sans se soucier du risque de préparer ainsi le terrain à un déchaînement de violences.
Note
- « Les Blancs, les Juifs et Nous », Editions La Fabrique, Paris, 2016.
Signataires
Isabelle Stengers, Philosophe
David Jamar, Sociologue
Véronique Clette–Gakuba, Sociologue
Khadija Senhadji, Anthropologue
Maryam Kolly, Sociologue
Gia Abrassart, Journaliste indépendante – Café Congo
Luis Martinez Andrade, sociologue mexicain
Malika HAMIDI, Docteur en Sociologie
Fatima Zibouh, Chercheuse en sciences politiques et sociales
Youri Lou Vertongen, Chercheur, Université Saint-Louis/Migrations et Luttes Sociales
Dyab Abou Jahjah, Écrivain et activiste
Martin Vander Elst, Philosophe, anthropologue
Nadia Fadil, Sociologue, Anthropologue
Maximin Emagna, Docteur en science politique, Europe Belgium Diversity (EBD)
Charlotte Kates, Samidoun Palestinian Prisoner Solidarity Network
Chris Den Hond, Journaliste et réalisateur
Nordine Saïdi, Bruxelles Panthères
Daniel Vanhove, Observateur civil et auteur
Eric Hulsens, Publiciste
Fabrizio Terranova, Cinéaste
Rachida Aziz, Le Space
Rudi Barnet, consultant audiovisuel
Tröss Nipanki, Éditeur
Dema, Artiste
Graziella Van Loo, Activiste
Jérémie Piolat, Auteur, Anthropologue
Manu Scordia, Dessinateur
Mouhad Reghif, Bachelier en Sciences Politiques
Marianne Van Leeuw Koplewicz, Éditions du souffle
Collectif des Citoyennes féministes et musulmanes.
Bruxelles Panthères.