Le préfet de la Réunion a annoncé, jeudi 5 mars, une baisse du prix de la bouteille de gaz, à compter du 12 mars, ainsi qu’une baisse du prix des carburants au 1er avril. Etes-vous satisfaits de ces propositions ?
Satisfaits, oui, mais à moitié seulement. Le préfet reconnaît notre légitimité, mais on ne sait rien du montant des baisses annoncées. Et d’autres dossiers très urgents attendent toujours d’être traités. Le Cospar réclame notamment une baisse de 20 % des prix de cinq cents articles de première consommation, et une hausse de 200 euros nets mensuels pour les bas salaires, les basses retraites, les minima sociaux, les bourses d’étudiants… Sur ces questions-là, nous n’avons pas de réponses pour le moment. Nous devons rencontrer le préfet demain à 11 heures pour en discuter.
Quelle est la situation économique à la Réunion ?
L’association UFC-Que choisir a mené, en 2007, une enquête sur les différences de prix entre la Réunion et la métropole. D’après leurs chiffres, certains produits sont jusqu’à 50 % plus chers dans l’île. A cela s’ajoute des revenus nettement moins élevés qu’en métropole et dans les autres DOM. Il y a véritablement un malaise au niveau du pouvoir d’achat des Réunionnais.
Comment expliquez-vous ces disparités ?
Le monde traverse une crise économique conjoncturelle très grave, mais ces problèmes ne sont pas nouveaux chez nous. L’île souffre depuis longtemps de situations de monopole qui perdurent et s’amplifient. On retrouve les mêmes personnes et les mêmes flux financiers entre certaines enseignes et certaines entreprises. Compte tenu de la tension qui règne aujourd’hui dans le pays, je ne donnerai pas de noms. Mais le Cospar réclame plus de transparence sur la formation des prix et les marges que se font certains bénéficiaires. Celui qui paye a le droit de savoir.
Votre collectif se défend de vouloir suivre le mouvement antillais. En quoi cette mobilisation se distingue-t-elle des autres ?
C’est un mouvement qui s’étale dans le temps et monte en puissance. Dès le mois de septembre 2008, l’organisation Agir pou nou tout a publié des rapports démandant aux autorités de faire la lumière sur la formation des prix. En janvier, l’intersyndicale a commencé à manifester. Nous sommes plusieurs associations à avoir tiré la sonnette d’alarme, mais nous savions que nous ne pouvions pas déclencher une grève générale du jour au lendemain. Il ne fallait surtout pas le faire au moment où la mobilisation se durcissait aux Antilles. Cela aurait mis en péril la cohésion sociale de l’île.
Le secrétaire d’Etat à l’outre-mer, Yves Jégo, a assuré que le gouvernement avait toutes les réponses aux revendications du Cospar. Qu’en pensez-vous ?
Quelles réponses ? Aucun accord n’a été signé pour le moment à la Réunion. Aucune rencontre n’a eu lieu entre les représentants de la grande distribution et le Cospar. Pareil pour les bailleurs sociaux et le patronat. Il ne faut pas se fier aux discours des gouvernants. Seuls les écrits comptent.
Vous avez appelé à la grève générale mardi prochain, mais, contrairement à ce qui s’est passé en Guadeloupe, vous ne réclamez pas le blocage de l’île. Pourquoi ?
La population souhaiterait que le Cospar durcisse le ton et mène des actions plus dures. Mais bloquer l’île, c’est mettre en difficulté les plus pauvres, les artisans, les personnes malades et ceux qui ont besoin de travailler tous les jours. Aujourd’hui, le préfet est d’accord pour négocier. Si nous sentons que ces discussions n’aboutissent pas, nous alerterons l’opinion. Attendons encore quelques jours. Le rassemblement de mardi sera décisif.
Propos recueillis par Elise Barthet, 05.03.09
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