Le 6 août 2008, des militaires avec à leur tête le général Mohamed ould Abdel Aziz renversaient le président élu Sidi ould Cheikh Abdallahi provoquant des protestations et manifestations violemment réprimées. Cette prise de pouvoir par la force a été condamnée par l’ensemble de la communauté internationale. De leur côté, les responsables français ont été plus ambigus : si le discours officiel a été de condamner le putsch et l’organisation d’une présidentielle, le secrétaire d’Etat à la Coopération Alain Joyandet déclarait dès août dernier que « les revendications des militaires ne sont pas toutes illégitimes ».
La communauté internationale a tout de même amené à la table des négociations les putschistes et leurs opposants démocrates (FNDD et RFD) aboutissant à la signature, le 2 juin dernier, des accords dits de Dakar. Ces accords prévoyaient la dissolution de la junte, la démission du président légitime renversé et une nouvelle élection présidentielle, ce 18 juillet, organisée par un nouveau gouvernement de transition nationale.
Depuis, la junte au pouvoir a multiplié les manœuvres dilatoires afin de retarder la mise en place de cet accord s’assurant ainsi un avantage certain face à une opposition sans moyen et n’ayant que peu de temps pour faire campagne.
De nombreux observateurs et analystes constatent toutefois que le général-candidat ne devrait même pas passer le premier tour malgré l’argent distribué pour acheter des voix. Ceci suscite leur inquiétude grandissante, ainsi que celle des démocrates mauritaniens et d’une majorité de la population, quant à l’ampleur des fraudes. Le général Abdel Aziz a même menacé à plusieurs reprises et publiquement de réaliser un nouveau coup de force si les choses n’évoluaient pas en sa faveur.
Face à cette situation, l’association Survie exprime ses plus grandes préoccupations quant aux fraudes prévisibles en faveur du candidat putschiste Abdel Aziz et le soutien que les plus hautes autorités françaises lui apportent.
La junte a, en effet, très rapidement trouvé des relais parmi les réseaux de la diplomatie française, notamment autour de la personne de M. Robert Bourgi, avocat et conseiller de nombreux dictateurs africains ainsi que du président français N. Sarkozy. Principal soutien international de la junte, l’Elysée a ainsi réussi à empêcher l’Union Européenne et l’Union Africaine de promulguer des sanctions individuelles à l’encontre des putschistes et de leurs soutiens, contrairement aux Etats-Unis.
Par ailleurs, de multiples témoignages accusent le premier secrétaire de l’ambassade de France d’être le conseiller de l’ombre de la junte. En outre, lors de son dernier séjour à Paris, Abdel Aziz a rencontré M. Erard Corbin de Mangoux, directeur général de la Sécurité extérieure française (DGSE), M. Guéant, secrétaire général de l’Elysée, et M. Bourgi. Le numéro deux de la junte s’est lui aussi récemment rendu en France pour acheter du matériel militaire au salon du Bourget. Ces derniers jours, M. Bourgi a même fait campagne à Nouakchott pour le général-candidat.
L’association Survie interpelle les parlementaires français sur cette situation et appelle les autorités françaises à :
– cesser tout soutien au candidat Abdel Aziz ;
– clarifier la fonction de M. Bourgi ;
– dénoncer toute fraude lors du scrutin présidentiel du 18 juillet prochain ;
– s’abstenir de reconnaître tout résultat qui ne sera pas accepté par l’ensemble des candidats et notamment ceux de l’opposition ;
– condamner toute menace portée au processus démocratique.
SOURCE : Survie