Tous les matins, à 9h pile, avec fébrilité, vous allumez votre ordinateur. Vous cliquez sur Firefox ou sur tout autre navigateur, et vous voilà sur le site des Indigènes de la république. Il est moche, oui ; il est mal foutu, brouillon, pas trop pratique, mais c’est le votre. Il vous informe ; il réfléchit avec vous ; il proteste en même temps que vous. Il s’énerve parfois, tout comme vous. C’est votre site parce que c’est le site des Indigènes de la république et que vous en avez assez d’être traités comme un indigène.
Ça, c’était hier. Aujourd’hui, vous êtes toujours chez vous sur indigenes-republique.fr. L’adresse a un peu changé mais le site est le même. Ou plutôt, il est le même et différent. La métamorphose a eu lieu. La chenille est devenue papillon (un papillon féroce).
Votre nouveau site est beaucoup plus beau. Plus confortable et fonctionnel. Plus riche. Plus interactif. Et il va encore s’améliorer. Sur le fond, la perspective qui est la sienne n’a pas changée : il reste un instrument d’informations, de réflexions et de luttes contre les nouvelles formes de l’indigénat. Il continuera d’aborder toutes ces questions, généralement marginalisées par les médias ou présentées comme si elles étaient extérieures les unes aux autres : les inégalités raciales en France, l’oppression coloniales dans les « Dom-Tom », les rapports de domination que la République entretient encore avec l’Afrique, la politique impériale à l’échelle mondiale, la colonisation sioniste de la Palestine, etc. De même, nous continuerons à donner toute sa place à l’histoire qui innerve le présent de cette société et irrigue nos mémoires ; l’histoire de l’esclavage de type américain, de la colonisation, de l’immigration et l’histoire des résistances, celles de nos ancêtres et celles de nos parents. La notre aussi. Car protester, c’est bien ; nous organiser, agir et proposer, c’est mieux. Comme le précédent, mais plus encore, ce nouveau site donnera ainsi une place privilégiée à nos luttes ; non pas seulement pour en faire le récit et en préserver la trace, mais aussi pour en tirer des enseignements, des méthodes, des perspectives qui leur permettront d’être plus efficaces. Nous avons supprimé certaines rubriques pour faciliter la navigation. D’autres ont vu leurs noms changer. Nous avons ajouté par contre des rubriques qui nous ont parues indispensables : une rubrique intitulée « Leur modernité », parce que le temps est venu de faire la critique de cette « modernité » en vertu de laquelle l’Euro-Amérique et ses dépendances s’autorisent à mesurer le degré d’« évolution » ou de « progrès » des autres peuples, et une rubrique « Islam », car l’islam est une des formes de culture et de spiritualité indigène. De nouvelles rubriques seront ultérieurement créées pour donner leurs places aux autres cultures et croyances auxquelles sont attachées à juste titre les différentes communautés indigènes qui vivent en France.
Comme vous l’aurez remarqué au premier coup d’œil, nos efforts d’innovation sur les plans formel et technique viennent appuyer un projet politique : la construction du Parti des indigènes de la république. L’ancien était centré sur l’information et l’analyse ; il visait à promouvoir une grille de lecture de l’actualité qui redonne toute sa place à la domination coloniale. Le nouveau site ne négligera pas le moins du monde ces dimensions : dans la colonne centrale seront ainsi mis en ligne des articles qui nous paraissent particulièrement pertinents de ce point de vue. Sur la droite (colonne « Sur le web »), nous opérerons une sélection d’articles parus sur le plus grand nombre possible de sites et de blogs en fonction de l’intérêt qu’ils représentent pour notre problématique. La « TV-Indigènes » comblera les attentes de ceux qui n’aiment pas lire.
Notre ambition, cependant, n’est pas seulement de vous permettre de trouver sur un seul espace web tous les documents qu’avec un peu de patience vous pourriez trouver tout seul, en vous aidant d’un bon moteur de recherche. Nous voudrions, surtout, que ce site puisse constituer un outil de construction d’une force politique indigène autonome, capable d’impulser un projet décolonial. Outre l’importance désormais accordée à l’engagement propre du MIR, nous consacrerons donc une place privilégiée aux initiatives et aux débats de tous ceux qui sont convaincus de la nécessité de constituer un véritable parti indigène. Surtout, de ce point de vue, il s’agira de tisser du lien entre les différentes communautés indigènes que la République s’attache à hiérarchiser et entre les multiples espaces de résistances, trop fragiles parce que trop souvent séparés. Il nous tiendra à cœur de favoriser les prises de parole indigènes, celles des « mous » comme celles des « radicaux », hétérogènes et mêmes contradictoires. Le principal, à nos yeux, est d’encourager l’expression et les controverses, que puisse progressivement se dégager une harmonie dynamique, c’est-à-dire critique, qui soit à l’image de ce que sera le parti des indigènes, polyphonique sans être cacophonique, capable d’agir en ordre selon nos intérêts communs et d’englober le désordre de nos trajectoires historiques particulières. Nous nous attacherons donc à faire de ce site une véritable plateforme d’échanges et de rencontres (militantes). Vous avez déjà la latitude de vous y exprimer de multiples manières et de débattre avec d’autres internautes : un véritable forum viendra très rapidement remplacer les anciens espaces de commentaires des articles. Pour l’instant nous vous offrons un répondeur téléphonique qui vous permet d’écouter vos messages directement sur le site, la possibilité d’ouvrir un blog, l’agenda qui accueillera les initiatives que vous voudrez bien nous signaler et, évidemment, l’adresse de notre rédaction où vous pouvez envoyer informations et articles. D’autres dispositifs interactifs sont prévus ; ils seront mis à votre disposition très rapidement.
N’insistons pas plus longuement ; finalement, il suffit d’un regard sur ce site pour découvrir toutes les potentialités qu’il recèle en termes de communication. Mais, puisqu’il faut conclure, nous ajouterons tout simplement ceci : il y a deux manières de combattre le racisme des médias. La première consiste à protester chaque fois qu’un présentateur télé ou qu’un journaliste profère quelques saloperies racistes. C’est utile ; ça leur fera les pieds et, peut-être, hésiteront-ils la prochaine fois avant de parler comme ça. En termes de rapports de forces « médiatiques », cependant, nous ne serons pas plus avancés. La deuxième, consiste à construire nos propres médias. C’est le choix que nous faisons.
Rédaction, le 1er novembre 2008