« IDF : Gaza smuggling resumed during offensive », de Hanan Greenberg, dans Ynet, le site en anglais du quotidien Yedioth Ahronot, 21 janvier :
« Le commandement militaire israélien n’a pas été surpris par les rapports du mercredi (21) affirmant que certains souterrains entre Gaza et l’Egypte avaient recommencé à fonctionner, malgré les lourds bombardements menés par l’armée israélienne durant trois semaines.
Des responsables de la sécurité ont dit que le Hamas avait tenté de reprendre la contrebande alors même que l’opération « plomb durci » était en cours. Ils ont ajouté que les souterrains bombardés seraient rapidement reconstruits. »
Une information que confirme sur le site en anglais du quotidien Haaretz, Anshel Pfeffer et Barak Ravid, « Sources : Hamas arms smuggling never stopped during IDF op in Gaza » (22 janvier) :
« Bien que les forces aériennes israéliennes aient bombardé tout le long du corridor de Philadelphie (à la frontière entre l’Egypte et Gaza) des centaines de fois durant l’offensive “Plomb durci”, des contrebandiers reconnaissent que certains tunnels sont restés en activité pendant les combats. Contrairement à ce qu’ont écrit les médias, l’aviation n’a pas utilisé les bombes les plus puissantes qui détruisent les bunkers. Les tunnels renforcés par des piliers de bois ont été particulièrement résistants aux attaques aériennes. »
Ces informations confirment deux choses :
le Hamas a été capable de maintenir des lignes d’approvisionnement même pendant les bombardements ;
très rapidement, les tunnels détruits sont reconstruits.
Il faut rappeler que, même durant ses longues années d’occupation, Israël a été incapable d’arrêter cette contrebande. Pas plus, d’ailleurs, qu’il n’a été capable d’arrêter le tir de Qassam venant de Gaza qui ont commencé alors que l’armée occupait encore ce territoire.
Un autre article du quotidien concerne le soldat franco-israélien Gilad Shalit, « Israel “ready to pay terrible price for Shalit” » d’Avi Issacharoff, Barak Ravid et Amos Harel (22 janvier). Désormais, le gouvernement israélien serait prêt à reprendre les négociations sur la libération du soldat et, comme l’a expliqué un ministre, avait « réalisé qu’il n’y avait pas d’autre choix que de payer le prix ». Le prix serait, selon l’article, la libération de « centaines de prisonniers dont beaucoup ont été impliqués dans des attaques terroristes qui ont coûté la vie à des Israéliens. »
Si cet accord se faisait, il constituerait, quoiqu’en dise le gouvernement israélien, un succès pour le Hamas. Parmi les revendications de ce dernier, la libération de Marwan Barghouti, un des dirigeants les plus populaires du Fatah, et qui a lancé début janvier un appel à l’unité et à la résistance.
Puisque l’on parle de prisonniers, profitons-en pour rappeler le cas du Franco-palestinien Salah Hamouri, toujours détenu en Israël.
Alors que les Nations unies semblent vouloir obtenir des éclaircissements sur les attaques qui ont visé des bâtiments sous leur contrôle et tué des dizaines de civils, Yossi Feldman et Uri Blau expliquent, dans un article de Haaretz (22 janvier), « comment les juristes de l’IDF ont légitimé les violences contre les civils » (« How IDF’s legal experts legitimized harming civilians »).
Il a fallu bien des pressions, expliquent les deux journalistes, pour que la section du droit international de l’armée israélienne donne une couverture légale à la première attaque, le 27 décembre, contre une école de police au moment de la cérémonie de remise de diplômes (attaque qui a fait plus de 40 morts, de simples policiers pour la plupart, qui n’ont rien à voir avec les combattants du Hamas) et aux bâtiments gouvernementaux. Ce relâchement des « règles d’engagement » militaire a conduit à la mort de nombreux civils.
Evoquant le bombardement de maisons dont les habitants avaient été avertis des tirs (voir ce qu’en dit Bernard-Henri Lévy), un ancien membre de la division du droit international de l’armée, Daniel Reisner, affirme : « Je ne crois pas que l’on peut incriminer quelqu’un seulement parce qu’il est sur un toit. »
Sur le bilan plus général de la guerre, deux voix dissidentes (mais ne partageant pas la même analyse). Israel Harel écrit un article intitulé « No reason for celebration » (Haaretz, 22 janvier) dans lequel il critique violemment l’armée israélienne, non sur ses méthodes mais pour n’avoir pas agi avec assez de détermination. Et il s’interroge pour savoir si un seul des buts a été atteint : libérer le soldat Shalit ? Détruire la majorité des roquettes ? Casser la colonne vertébrale du Hamas ? Mettre sa direction hors d’état de nuire ? Empêcher tout passage clandestin de roquettes à travers la frontière ou détruire toute possibilité de construire ces roquettes à Gaza ?
Gideon Levy, l’un des rares critiques de l’opération israélienne, affirme dans Haaretz (22 janvier) que la guerre s’est terminée par un échec total israélien : « Gaza war ended in utter failure for Israel »
Il écrit que le but d’arrêter les tirs de Qassam n’a pas été atteint, ceux-ci ont continué jusqu’au dernier jour et grâce au cessez-le-feu. Le Hamas posséderait encore un millier de roquettes.
Le second objectif de stopper la contrebande n’a pas non plus été atteint (lire le début de cet article).
Troisième but, renforcer la dissuasion. « Mon oeil, écrit-il. La dissuasion que nous avions soi-disant atteinte durant la guerre du Liban n’a pas dissuadé le Hamas. »
Le quatrième objectif non déclaré, restaurer la crédibilité de l’armée israélienne n’a pas été atteint non plus. On ne restaure pas cette crédibilité en se battant avec des combattants pauvrement armés. Et les poèmes à la gloire de l’armée n’y changeront rien.
Enfin, écrit-il, il ne faut pas être trompé par les parades de soutien des dirigeants européens à Olmert. Les actions d’Israël ont porté un dur coup au soutien populaire international à Israël. « Elles ont choqué tout être humain qui les a vus même si elles ont laissé de marbre l’opinion israélienne. »
Alain Gresh