Une odieuse campagne d’extrême droite a été lancée, soutenue par le Figaro et tous les « chiens de garde » de l’ordre colonial contre la famille Traoré. Ils entendent la salir à travers le passé judiciaire d’une partie de la fratrie. Cette carte est souvent utilisée comme un joker entre les mains du pouvoir pour justifier la répression et la mort des nôtres, pour discréditer et faire pâlir la solidarité autour du Comité alors que celui-ci lutte pour faire la lumière sur une mort entre les mains de la gendarmerie. Cette tentative de disqualification est nulle et non avenue pour ne pas dire obscène.
Dans le même temps, les syndicats de police, ulcérés par les petites concessions de Castaner, montent au créneau aux cris de : « Pas de police, pas de paix !» détournant, toute honte bue, un slogan historique des luttes indigènes : « Pas de justice, pas de paix !». Ils viennent de recevoir un soutien appuyé de Marine Le Pen. Le coup de pression de la police nationale pour faire plier Castaner à la veille de la manifestation appelée par la famille n’est pas surprenant mais il est inquiétant. Son mot d’ordre : « pas de police, pas de paix » est redoutable et il ne faut pas le sous-estimer. Car si l’institution policière est mise au pied du mur grâce aux mobilisations historiques conséquentes à l’assassinat de George Floyd, elle n’en est pas moins soutenue par un puissant arc de cercle qui va des socialistes à l’extrême droite, en passant par les classes dirigeantes et par le pouvoir d’Etat. Elle est aussi soutenue par des syndicats largement gangrénés par l’extrême droite. Il ne fait ainsi aucun doute que ce slogan fera mouche lorsque l’opinion sera retournée au moindre fait d’actualité (attentats, révoltes urbaines, mouvements insurrectionnels). La manifestation du comité Adama et le succès qu’on espère n’en sont que plus cruciaux.
Il ne faut cependant pas insulter l’avenir. Nous vivons un moment exceptionnel à l’échelle de l’Occident. La fracture raciale s’impose comme un fait social structurel confirmé tant par la constance et la virulence des violences policières que par les mobilisations antiracistes monstre qui explosent aux Etats-Unis et se répercutent en Europe non par mimétisme mais parce que la condition indigène est partagée partout en Occident. Aujourd’hui, les luttes contre la négrophobie, les violences policières et le racisme structurel sont inscrites dans l’agenda et sont non négociables. Cette puissance qui déborde le pouvoir et déboulonne ses statues doit être soutenue, prolongée et renforcée. Elle dessine ainsi les contours d’une internationale antiraciste et pourquoi pas décoloniale ? Ce qui n’était jusqu’ici qu’une volonté militante devient une réalité tangible de par l’intensité des manifestations étasuniennes, belges, britanniques, suisses, australiennes ou françaises.
Demain aura lieu une grande manifestation antiraciste à l’appel du comité Adama. Elle reçoit tout notre soutien. Nos pensées vont aussi vers toutes ces familles – celles d’Amadou Koumé, Lamine Dieng, Babacar Gueye, Abdoulaye Camara, Wissam El Yamni, Ibrahima Bah, Angelo Garand, Hocine Bouras, Amine Bentounsi, Hakim Ajimi, Cedric Chouviat, Zyed Benna, Bouna Traoré, Ali Ziri, Muhittin Altun, Gaye Camara, Mehdi Boudouda, Mohamed Boukrourou, Lahoucine Ait Omghar, Aboubakar Fofana, Lassana Diarra, Theo Luhaka, Rémi Fraisse, Mohamed Gabsi, Mahamadou Marega, Shaoyo Liu, Zineb Redouane, Abou Bakari Tandia, Mourad Touat, Yakou Sanago, Karim Taghbalout, Allan Lambin, Romain Chenevat, Steve Maia Caniço, les mamans de Mantes-la-Jolie… – qui luttent aussi pour que justice leur soit rendue. Demain sera une étape importante vers ce dénouement qu’on espère proche, in cha Allah !
Tous à la marche !
Houria Bouteldja, membre du PIR