Ces manipulations ne vont pas sans mesures répressives. Des armes juridiques se déploient à cet effet – des mises en accusation avec pour seule fin l’intimidation, aux condamnations pour l’exemple, en passant par la multiplication des lois d’exception.
C’est un large pan de la résistance qui en fait les frais. Sous divers registres, avec plus ou moins d’intensité, on assiste à une escalade autoritaire générale.
Il y a peu, des postiers grévistes du 92 Nord ont été condamnés pour une « séquestration » qui n’a pas eu lieu, une machination orchestrée par leur direction qui s’était enfermée dans ses propres locaux tandis que des salariés les occupaient.
À une justice à deux vitesses s’ajoutent l’inflation de la surveillance, du fichage, des quadrillages policiers et la militarisation de l’espace public.
Il y a un an à peine, pendant la mobilisation contre la réforme des retraites à Lyon, une mani-festation lycéenne a été littéralement assiégée par la police pendant près de six heures sur la place Bellecour. Les manifestant•e•s ont été bloqué•e•s sur la place par les forces de l’ordre, sous les gaz lacrymogènes, les grenades déflagrantes, les canons à eau et les matraques. Il est avéré que la police y a procédé à des contrôles d’identité et à des filtrages au faciès.
C’est là un trait saillant de ce tournant répressif : il frappe de façon spécifique les populations que le pouvoir identifie comme non-blanches, c’est-à-dire susceptibles de s’inscrire dans les luttes des descendants de colonisés.
Ce sont ces luttes qui sont directement attaquées au travers des procès menés contre les activistes de la campagne de Boycott Désinvestissement Sanctions contre Israël sous couvert de « discrimination sur la base de la nationalité ».
De l’instauration d’un couvre-feu en 2005 à l’usage des dénonciations anonymes rémunérées qui ont accablé Villiers-Le-Bel, jusqu’au procès et aux condamnations auxquels elles ont abouti et qui sont venus sonner comme une vengeance d’État, c’est la résistance aux crimes policiers qu’on cherche à anéantir.
À l’échelle de l’espace public, les musulman•e•s sont également directement visé•e•s par ces offensives successives. Les femmes musulmanes sont devenues, à leur corps défendant, les faire-valoir des campagnes islamophobes. Depuis la loi de 2004 qui interdisait le port du voile à l’école, on a interdit le port du voile intégral, les tribinaux entérinent l’exclusion des mères voilées de la participation aux sorties scolaires et un projet, lancé par une partie de la gauche sénatoriale, envisage d’étendre la prohibition aux professionnel•le•s en charge de la petite enfance.
Il est temps d’en finir avec ces mesures d’exception. L’ « arbitraire » ne frappe pas au hasard : les appareils législatifs conçus contre quelques un•e•s s’appliquent avec leur lot de « victimes collatérales ».
La lutte contre les lois antiterroristes a, par exemple, été trop longtemps ignorée par les forces progressistes. L’affaire dite de Tarnac n’a été, en un sens, que l’exception qui confirme la règle, les inculpé•e•s ayant d’ailleurs bénéficié d’un soutien qui aurait été inespéré pour les victimes consacrées – « les barbus », « le péril islamiste » – de l’acharnement antiterroriste.
Enfin, la plainte déposée contre Houria Bouteldja et la mise en avant de la notion inique de « racisme antiblancs » sont à prendre très au sérieux. Considérer qu’oppresseurs et opprimé•e•s se valent, et qu’il y aurait donc un « racisme antiblancs », relève non seulement du non-sens mais vise plus largement à mettre en oeuvre un virage dans la lutte contre les discriminations. Cette invocation met en péril tout objectif égalitaire.
À la veille du procès qui attend Houria Bouteldja – contre qui l’AGRIF (Association générale contre le racisme et pour la défense de l’identité française et chrétienne) a déposé plainte -, nous vous invitons à rencontrer les représentant•e•s de différentes luttes qui essuient les attaques du tournant répressif. Il ne s’agira pas de faire entendre une seule et même voix, mais plutôt de donner lieu à un partage d’expériences et de savoir faire pour combattre l’État autoritaire sur tous les fronts.
Comité de soutien à Houria Bouteldja