Aujourd’hui, 8 mars 2010, journée de LA femme, nous pouvons l’affirmer le féminisme est dépassé. Le mythe de l’égalité déjà là lui a succédé. Désormais, il ne s’agit plus que de consacrer LA femme, la seule, l’unique, la belle, la docile, la désirable, la douce, la sexy, la farouche, la timide, la passionnée, la fidèle, l’amoureuse. Ce modèle de féminité super-woman qui dans sa fraicheur de fleur se laisse butiner par les jeunes hommes virils jusqu’à tomber sur le bon. Souvent il arrive que la fleur, trop banale, ressemblant davantage à une marguerite qu’à une rose, finisse avec un frêle moucheron ou un bourdon tabasseur. Mais si elle a réussi à montrer ses plus beaux reflets sans se fâner, ni se donner à trop de butineurs, elle pourra espérer tomber sur l’homme idéal. Ensuite arrivera donc le temps cumulée de la maternité et de la vie active. Libre de travailler autant qu’un homme pour un salaire, une carrière et un emploi raisonnable et féminin. Raisonnable et féminin signifie aussi pour les grincheux, un salaire 27% inférieur en moyenne à celui d’un homme, une carrière bloquée par le plafond de verre, et des professions jugées peu sérieuses et peu socialement valorisées. A la maison c’est encore mieux, elle est émancipée forcément car avec son salaire elle pourra se payer robots et nounous. Elle est fortement encouragée lire le plus souvent possible des magazines féminins pour être la plus sexuellement performante avec son Jules. Un Jules forcément, pas un Mohamed, ni un Mamadou, car le Jules est émancipateur, tout autant que bon amant… Tout ça bien sur en espérant ne pas faire partie des 100 000 femmes violéees par an, des 675 000 femmes battues par leur mari, des 80% d’emploi précaires occupées par des femmes, des millions de femmes pauvres qui doivent s’occuper quasiment seules de leur progéniture et du travail domestique ou des 156 femmes mortes tuées par leur mari ou compagnon. Concilier harmonieusement tout à la fois, vie de mère, de jeune fille, d’épouse, de fantasme sexuel, de travailleuse, de femme domestique, voici son nouvel idéal d’émancipation.
Si le féminisme est une chose dépassée en Occident, remplacée par l’harmonie entre les sexes, en revanche, c’est une chose qui reste bonne pour les Autres, les femmes non-blanches ou musulmanes. Bref ici, les femmes issues des immigrations post-coloniales ou carrément vivant là-bas dans le Sud. Mais plus que bonne, ce féminisme devient une mission de civilisation pour toutes les femmes d’Occident qui sont aimablement mais fermement invitées à déverser leur mélancolie de femmes émancipées dans une grande cause d’ingérence humanitaire.
Ce féminisme, que je me permets de qualifier de colonial, a pour but d’émanciper les jeunes fillettes africaines indigènes excisées et d’en faire de sublimes mannequins afin d’exporter, à travers le monde, ce merveilleux modèle de féminité moderne, émancipateur, bref occidental, à des millions d’Autres fillettes, jeunes femmes, et mères indigènes. Différents modèles existent, de fleur du désert, à fille du jasmin ou encore fleur de lotus bien sur en gardant les grands classiques roses roses (brunes) et roses rouges (blondes)…
Ce travail merveilleux s’accomplit bien sur au travers de Journée Mondiale de LA Femme, mais également à travers de publicités non-sollicités par email, autrement dit SPAM. Publicités au profit d’entreprises tel que Pinault Printemps Redoute dirigée par 5 Jules et 0 femme. Mais rassurez vous… Ces publicités sont réalisées probablement par une agence du type de Publicis suite à une étude de marché probablement réalisé par une entreprise du type d’IFOP. Publicis dont la principale actionnaire se trouve être une femme, féministe de surcroit, Elisabeth Badinter. Grande libératrice des femmes burkisées et voilées de France et d’Afghanistan au côté de Ni Putes, Ni Soumises… IFOP dont la dirigeante est la sémillante patronne des patrons Laurence Parisot. Celle-là même qui du haut de son émancipation déclarait «La vie est précaire, l’amour est précaire, pourquoi le travail ne serait pas précaire ?» Sans compter une éventuelle loi pour garantir aux bourgeois de sexe féminin un quota de sièges dans les CA des grandes entreprises… Ce modèle de prêt-à-porter unique de femme ne taille pas 40, mais plutôt CAC 40… La boucle est bouclée, LA femme produit de grande consommation est désormais partout disponible pour votre plus grand désir…
Si Christine Delphy appelerait, elle, à retrouver l’élan du féminisme, je me bornerais, moi, de ma position de rajel (monsieur en arabe)], à appeler à la défense des femmes, de toutes les femmes, des filles, des jeunes femmes, des mères, des anciennes, des non-blanches, des prolos. Ne vous étonnez pas d’entendre déjà des grondements des défenseurs de LA femme, ils ont raison, il ne s’agit ni plus, ni moins que de sonner le glas de LA femme. Mais aussi de l’Homme…
[Bader Lejmi, membre du Parti des Indigènes de la République