Ainsi parlent les sionistes

« ils sont la multitude, mais nous nous sommes l’Humanité »

L’association France Israël donnait en novembre dernier, une réception à l’occasion de la venue en France du vice-premier ministre israélien et ancien chef d’état major, Moshe Yaalon. Deux discours particulièrement intéressants ont été prononcés ce soir là.

Jean-François Copé, président du groupe UMP à l’Assemblée, membre du comité directeur de l’association en question, et qui appelle la droite décomplexée « à revenir à ses fondamentaux » s’est lancé le premier. William Goldnadel, invité personnel de Nicolas Sarkozy lors de son dernier voyage à Tel-Aviv, président de l’association France Israël et récemment élu au comité directeur du CRIF en exhortant ce dernier « à se libérer intellectuellement » a creusé le sillon tracé par le premier. L’intérêt de ces deux contributions est de mettre en évidence l’inquiétante proximité idéologique qui lie souchistes et sionistes de France. Les propos se complètent, se prolongent et s’enchevêtrent pour ne plus tourner qu’en circuit fermé et fonctionner sur des idées à double détente capables d’alimenter en allers et retours chacun des deux discours.

Jean-François Copé s’extasia, comme il est toujours bienvenu de le faire, sur les performances techniques miraculeuses d’Israël qui fait pousser, après les oranges, une « deuxième sillicon valley en plein milieu du désert aride ». Peut être s’agissait-il aussi de faire d’une pierre deux coups, et d’adresser par la même, un signe à Christian Estrosi, ministre chargé de l’industrie (et par ailleurs auteur du projet de loi destiné à lutter contre les bandes organisées), également présent dans l’assistance ce soir là. Il affirma ensuite que « l’entrée d’Israël dans la francophonie tombait désormais sous le sens » et se félicita de ce que les relations franco-israéliennes n’aient jamais été aussi bonnes.

William Goldnadel laissa tomber « le vouvoiement hypocrite » pour modérer quelque peu l’enthousiasme de son collègue et circonscrire le périmètre des bonnes dispositions à l’égard de Tel-Aviv au sommet de l’Etat français et « à la tête du groupe majoritaire où l’on trouve désormais (et il insiste : désormais), des hommes qui n’ont plus à faire la preuve de leur amitié pour Israël ».

Pour le reste de la société en revanche, tout n’est plus «qu’idéologie délétère, qui se croit progressiste » mais fait objectivement « alliance avec l’islamisme le plus rétrograde, dans la rue comme dans les médias ». « Des bandes déterminés, organisées, puissamment financées, profitant de bouleversements démographiques en rien maîtrisés, dont il est de très mauvais goût de seulement s’inquiéter, contribuent puissamment à la détestation d’Israël et de son peuple. Le boycott de ses produits, de son agriculture, de sa Culture, pourtant rayonnante, commence à devenir naturel. Des femmes voilées ou en burqa pénètrent violemment dans les supermarchés pour empêcher leur vente dans un étrange silence ».

Copé jugea important d’assurer l’auditoire de sa « vigilance sur la question de l’antisémitisme », de sa « fermeté sur le nucléaire iranien qui menace l’existence d’Israël », de la préoccupation constante que constitue pour lui le sort de Gilad Shalit et souligna que le boycott de produits israéliens était à la fois illégal et immoral. Toutefois, se devant, au nom de la haute idée qu’il se fait de l’amitié, de tenir le langage de la vérité à son invité, il ne manqua pas d’enjoindre des israéliens « à qui on demande toujours beaucoup (…) de continuer de faire des efforts sur les colonies ». « Même si c’est difficile ». « Même s’ils sont parfois découragés par tant d’espoirs déçus ».Un jour peut être, il sera possible, une fois l’arrêt de la violence obtenu, d’engager « avec des interlocuteurs modérés (…) qui condamnent clairement le terrorisme et mènent une lutte effective contre celui-ci » des négociations sur la création d’un « Etat palestinien qui ne soit pas une menace pour Israël ».

Pour conclure sur des perspectives plus réjouissantes, il tint à saluer toutefois « le comportement exemplaire des juifs de France dans le débat sur l’identité nationale » car « ils ont fait la preuve que la France ne demande pas à ses enfants de se dépouiller de leur identité » et proposa qu’on réfléchisse en France à l’efficacité du modèle d’intégration israélien.

Longuement habitué lui-même à endurer « la détestation, le dénigrement quotidien, systématique, disproportionné, obsessionnel (…) et ce même en période faussement calme (…) tant la haine de la chose juive est avant tout la haine de la civilisation pacifiée », et n’attendant plus grand-chose d’une jeunesse occidentale trop acculturée pour croire encore à la terre, à la nation ou aux frontières, Goldnadel dressa, lui, en un dernier paragraphe qui mérite bien d’être reproduit in extenso, un parallèle saisissant où il fait le tour en quatre phrases à peine, de tout ce que peuvent partager les sionistes français et le régime au pouvoir en France:

« La détestation de la France que nous aimons, de sa nation, de son état, de son passé, est de la même farine et du même mauvais levain. Ses ennemis ne puisent pas leur haine, comme on est arrivé à le faire croire dans leur prétendue misère ou leurs improbables souffrances, mais dans la faiblesse d’une nation incertaine de sa légitimité. Ils croient pouvoir nous abattre ou nous intimider : leur haine maladive nous renforce. C’est vrai, ils pensent vaincre et subjuguer parce qu’ils sont la multitude, mais nous nous sommes l’Humanité »

Julien Stanko

PS : Gageons que Jean-François Copé, s’il avait dû prononcer lui-même le dernier paragraphe du discours de William Goldnadel, l’aurait sans doute précédé d’une formule qu’il semble affectionner particulièrement : « il ne faut pas stigmatiser ».

Discours de W. Goldnadel

Discours de J.F. Copé (pages 38-39)

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