Christian Delorme, un infatigable marcheur pour la dignité

Huit années avant la Marche de 1983, un jeune curé de 25 ans alerte les pouvoirs publics sur les violences subies par des prostituées au centre d’une recomposition musclée du proxénétisme lyonnais. A leurs côtés, il appuiera leur mouvement d’occupation de l’église Saint-Nizier à Lyon.

Il ne sollicitera pas l’accord de sa hiérarchie, celui de sa conscience suffira ; il en sera de même quelques années plus tard à Vénissieux les Minguettes. Il s’appelle Christian Delorme.

Clairvoyant sur l’état des rapports de force et la gravité des enjeux soulevés par le contexte lyonnais, cet adepte de la non violence proposera la seule initiative possible à Toumi Djaïdja , Djamel Attalah et leurs compagnons. Ce ne sera pas une lubie mais une issue  provisoire, une grande respiration en attendant un autre possible …

Pour avoir grandi et vécu au cœur du quartier historique de l’immigration maghrébine à Lyon (Place du Pont), Delorme sait de quoi est capable une police qui pratique toujours la rafle dans les bidonvilles arabes usant des sales méthodes importées des guerres coloniales.

Dans une municipalité communiste particulièrement hostile aux jeunes révoltés, Delorme redoutait le feu vert du Ministre de l’Intérieur (Gaston Deferre) à la police lyonnaise pour mater la Cité rebelle de Vénissieux.

Coincés entre une frange de la police prête pour l’assaut final et des gauchistes délirant sur les jeunes émeutiers perçus comme l’avant garde d’un nouveau prolétariat urbain, que faire ?

La tentative de meurtre sur Toumi Djaïdja décidera de cette longue Marche inédite en France qui n’est pas sans rappeler les Marches pour les droits civiques de Luther King aux États-Unis ou la Marche du sel de Gandhi.

Les marcheurs ont révélé le climat d’une violence inouïe, infligée au Monde des migrants et de leurs enfants.

La Marche de l’Égalité a mis un terme à ce huis clos silencieux régenté depuis la guerre d’Algérie par un ordre policier et racial dont les cités françaises de l’immigration sont régulièrement endeuillées.

Avec la Marche de l’Égalité, Toumi et Delorme ont  répondu à un état de nécessité en s’extrayant provisoirement du conflit police /jeune tandis que le pasteur Jean Costil de la Cimade Lyon, élargira l’initiative à la question du statut des étrangers en France notamment au regard de la précarité du  séjour. A l’Élysée, C.Delorme défendra avec pugnacité le titre unique de 10 ans renouvelable de plein droit. Après trois relances, F.Mitterrand consentira à cette revendication fondamentale.

Huit mois plus tard, la carte de résidence * était née (Loi 17-07-1984).

Dans le prolongement de la Marche de l’Égalité  et sans faire d’étincelle, le Père C.Delorme et le Pasteur Jean Costil seront particulièrement actifs sur la question du droit au séjour en se mobilisant fortement contre les projets de loi liberticides notamment contre les lois Pasqua ( 1986 et 1994 ), en apportant leur soutien juridique et la logistique administrative aux personnes touchées et l’indispensable formation à tout militant investissant les permanences juridiques d’accueil.

Référence incontournable en ce domaine, le Pasteur Jean Costil sera souvent sollicité par le milieu associatif et toujours de bon conseil.

Christian Delorme et Jean Costil apporteront également leur concours efficace et discret dans les situations tragiques relatives à des procès de meurtriers de jeunes victimes des politiques sécuritaires.

Initiateurs de la Marche organisée il y a trente ans, Toumi Djaidja et le père Christian Delorme seront à Roanne le 30 novembre 2013 au Cinéma le Grand Palais à Roanne. http://www.legrandpalais.fr/

Cette rétrospective sera donc l’occasion de débattre avec les acteurs historiques de la Marche de l’Égalité tout en soulignant l’engagement exceptionnel de certaines consciences antiracistes auxquelles il convient de rendre hommage.

Le Samedi 30 novembre 2013

Roanne 42 300

Cinéma le Grand Palais

Cours de la République

Tél : 08 92 68 03 42

Le Progr+¿s 14-11-2013

 

* Le Titre de séjour  unique de 10 ans (Loi du 17-07-1984) renouvelable de plein droit est l’un des acquis essentiels de la Marche de l’Egalité que ne manquera  pas de remettre en cause le gouvernement Chirac par les Lois Pasqua I (Loi 09-09-1986).

 

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